Foire aux questions
Retrouvez dans cette rubrique les questions les plus récurrentes sur le programme ITER.
ITER, en latin « le chemin », est une expérience scientifique à grande échelle qui doit démontrer la faisabilité scientifique et technologique de l'énergie de fusion. ITER est actuellement en cours de construction à Saint-Paul-lez-Durance (Bouches du Rhône). Dans le cadre d'une collaboration sans équivalent, sept pays ou groupe de pays membres d'ITER - la Chine, l'Europe, l'Inde, le Japon, la République de Corée, la Fédération de Russie et les États-Unis — œuvrent conjointement pour concevoir et réaliser la plus grande machine de fusion de l'histoire. ITER ne produira pas de l'électricité mais sera l'outil à partir duquel — de par sa taille, ses matériaux novateurs et ses technologies - les physiciens et les ingénieurs pourront résoudre des problèmes-clé avant de passer à l'exploitation industrielle et commerciale de la fusion.
Conçu pour produire 500 MW d'énergie de fusion à partir d'un apport externe de 50 MW dans ses systèmes de chauffage, ITER sera le premier dispositif de fusion capable de générer de l'énergie de manière effective, et ouvrira ainsi la voie vers un réacteur de démonstration, DEMO.
La construction de l'installation a démarré en France en 2010. Tandis que les travaux de construction progressent sur le chantier à Saint-Paul-lez-Durance (13), les industries des Membres d'ITER fabriquent des éléments de haute technologie destinés au réacteur de fusion — le tokamak. Les livraisons s'accélèrent et, au mois de mai 2020, les équipes ont introduit le premier élément de la machine dans la fosse du tokamak.
ITER est l'un des projets scientifiques et industriels le plus complexe au monde. Les industries impliquées ont d'ores et déjà mis en place des programmes de recherche et de développement pour répondre aux exigences liées à la fabrication des pièces des machines. ITER est l'aboutissement d'un demi-siècle de recherche dans le domaine de la physique des plasmas. Le programme doit démontrer que la maîtrise de l'énergie de la fusion est à notre portée.
ITER constitue une étape expérimentale entre les machines de fusion actuelles, centrées sur l'étude de la physique des plasmas, et les centrales de fusion de demain.
Avec ITER, la communauté de la physique des plasmas disposera d'un dispositif uniquee, capable de produire des décharges de plasma beaucoup plus longues que celles obtenues dans d'autres installations de fusion. La machine ITER sera deux fois plus volumineuse que le plus gros dispositif de fusion expérimental en service à ce jour, le JT-60SA (Europe/Japon), pour un volume de plasma six fois supérieur. La machine expérimentale ITER a été conçue pour :
• confiner un plasma deutérium-tritium dans lequel le chauffage par les particules alpha est prédominant,
• générer une puissance de fusion de 500 MW (Q=10), à partir de 50 MW injectés dans les systèmes de chauffage,
• contribuer à démontrer le fonctionnement intégré des technologies intervenant dans une centrale de fusion,
• tester des concepts de module tritigène,
•. démontrer la sûreté d'un dispositif de fusion.
La fusion, c'est une source d'énergie prometteuse à long terme pour répondre de manière durable aux besoins en énergie des populations de la planète, si tous les défis sont résolus.
Pour un projet de cette envergure, sans précédent, impliquant une collaboration mondiale et des dépenses de milliards d'euros, on ne peut s'attendre à ce que la communauté scientifique soit unanime sur les objectifs ainsi que sur la base scientifique et technique du projet. Un consensus scientifique peut être possible tant que les discussions restent à un niveau conceptuel, mais dans un monde où règne une compétition féroce pour le financement de la recherche, il est inévitable que des scientifiques de différents domaines critiquent la décision de dépenser de l'argent pour un grand projet, arguant qu'ils préféreraient que l'argent soit investi ailleurs.
Ce que l'on peut dire à propos d'ITER, c'est que large majorité de la communauté scientifique du domaine de l'énergie, considère ce projet comme une étape clé dans la recherche d'une énergie alternative pour l'avenir de l'humanité. L'approche politique et scientifique du projet, aujourd'hui, n'est pas due au lobbying de quelques personnes d'influence. Elle résulte de décennies de recherches minutieuses, étape par étape, réalisées dans le monde entier par des scientifiques du domaine de la fusion et de discussions animées au sein des institutions scientifiques des pays concernés. Celles-ci ont débattu des options, des coûts et des risques et décidé que le projet ITER constituait un investissement rentable pour notre avenir énergétique commun. Le nombre d'articles traitant directement d'ITER présentés aux principales conférences scientifiques internationales sur le thème de la fusion ou publiés dans les journaux scientifiques spécialisés dans la fusion ne cesse de croître depuis de nombreuses années. Le fait que la recherche destinée à ITER constitue à présent un sujet dominant dans ces articles démontre à quel point ce projet est essentiel pour faire progresser la fusion vers la production de l'énergie.
Si la phase d'opération deutérium-tritium, qui vise un facteur d'amplification de l'énergie de 10 (Q ≥ 10) constitue le cœur de la mission d'ITER, il importe de souligner l'importance du retour d'expérience engrangé tout au long des phases de conception, de construction, de fabrication et d'assemblage/installation. La nature inédite des éléments d'ITER a généré de très nombreux défis, qui ont pu être relevés grâce aux capacités d'innovation et aux percées réalisées dans le domaine de l'ingénierie par des entreprises sous-traitantes et des laboratoires dans le monde entier. De fait, le programme international ITER lui-même peut être qualifié de laboratoire expérimental. De manière plus anecdotique, de nombreux acteurs du monde de la fusion considèrent que l'émergence de projets émanant du secteur privé et les investissements qu'ils impliquent procèdent des succès jusqu'ici accumulés par ITER.
La recherche sur la fusion et le rôle d'ITER ont fait l'objet d'un examen approfondi par des groupes d'experts indépendants mis en place par les agences de financement en Europe et dans la plupart des autres pays partenaires d'ITER. Les résultats de ces investigations donnent la mesure la plus fiable du consensus de la communauté scientifique en la matière. Quelques exemples :
• En 2004, lors des premières étapes de négociation d'ITER, un groupe de haut niveau présidé par Sir David King (conseiller scientifique principal du gouvernement britannique) a conclu qu'il était temps de hâter le développement du projet ITER et a recommandé de financer une « Approche accélérée » de l'énergie de fusion. En 2013, l'EFDA (European Fusion Development Agreement, devenu EUROfusion) a publié un projet en huit étapes pour la réalisation de l'énergie de la fusion avant 2050. Ce projet a été mis à jour en 2018.
• L'Académie des sciences française a organisé un examen détaillé de l'état des connaissances et des défis que la fusion doit relever, tant pour ce qui concerne le « confinement magnétique » (dont ITER) que pour ce qui a trait à la « fusion inertielle » à base de lasers. L'analyse a été publiée en 2007 dans un ouvrage qui insistait sur les arguments en faveur de la construction d'ITER.
• Les États-Unis ont suivi un long processus avant de décider de réintégrer le projet ITER dont ils étaient sortis à la fin des années 1990. L'Académie nationale des sciences américaine a créé un groupe réunissant des experts de la fusion et des scientifiques chevronnés, spécialisés dans des domaines de recherche connexes tels que la fission nucléaire, la physique des hautes énergies et l'astrophysique. Les scientifiques non spécialisés dans la fusion étaient en mesure de faire des recommandations. Le groupe a fortement soutenu le renouvellement de l'adhésion des États-Unis au projet ITER, qui constituait à leurs yeux la meilleure voie vers l'énergie de fusion.
• La Chine a annoncé en 2011 que 2 000 experts en fusion seraient formés sur les 10 années à venir pour assurer la recherche et le développement de cette technologie prometteuse.
• Dans le rapport qu'il a remis au Congrès américain au mois de mai 2016, le Département de l'Energie américain recommande le maintien des Etats-Unis dans le programme ITER — une position qui devra être réexaminée à la fin de l'année 2018. Le rapport note que « le management d'ITER Organization et les résultats obtenus par le programme ont connu une amélioration sensible » et conclut qu'en dépit des délais accumulés, « ITER demeure le moyen le plus rapide pour accéder à l'étude des plasmas de fusion. »
• En juin 2017, la Commission européenne a publié un document de 14 pages destiné au Parlement européen et au Conseil européen confirmant son soutient "a un programme ITER réformé."
• Fin 2017, l'Académie nationale des sciences américaine a publié le premier volet d'une étude sur l'état de la recherche sur la fusion magnétique aux Etats-Unis et sur le potentiel de cette discipline. Les auteurs du rapport préconisent le maintien des Etats-Unis dans le programme ITER et le développement d'une stratégie à long-terme pour l'énergie de la fusion. (Le rapport peut être consulté en anglais ici.)
• Avril 2018 le Conseil de l'Union européenne a chargé la Commission d'approuver la nouvelle feuille de route du programme ITER. Un mois plus tard, le budget pluriannuel de la Commission (2021-2027) comprend un financement sans équivoque au programme.
• Début 2019 l'Académie nationale des sciences américaine a rendu son rapport final, préconisant le maintien des Etats-Unis dans le programme ITER ainsi que le lancement d'un grand programme national de recherche et d'investissement dans la fusion menant à la construction d'un réacteur pilote.
• A la demande du FESAC (US Fusion Energy Sciences Advisory Committee, Department of Energy), des centaines de spécialistes américains ont collaboré à l'élaboration d'un plan stratégique pour la réalisation d'un programme national de recherche et d'investissement dans la fusion culminant dans la construction d'un réacteur pilote. Ils ont publié leurs travaux sous le titre A Community Plan for Fusion Energy and Discovery Plasma Sciences (téléchargeable ici). Un rapport final « Powering the Future: Fusion & Plasmas » a été édité sur la base de ces travaux au mois de décembre 2020, et servira maintenant de support à l'élaboration d'un programme à long terme par le Département d'énergie américaine (Office des sciences de la fusion). A chaque fois, la participation dans ITER est citée comme une étape essentielle.
• À la demande du Département d'énergie américaine, un panel de 12 scientifiques a été chargé de décrire les étapes et l'innovation nécessaire pour la réalisation d'un réacteur de fusion, générateur d'électricité, pour le moindre coût. Le rapport publié au mois de février 2021, titré « Bringing Fusion to the U.S. Grid », conseille la construction d'un réacteur pilote de 50 MW. (Il est téléchargeable ici.) Au mois de décembre 2023, le gouvernement américain a publié « Building Bridges: A Vision for the Office of Fusion Energy Sciences. »
• Le gouvernement britannique a publié une stratégie nationale en matière d'énergie de fusion en 2021, puis une mise à jour « Vers l'Energie de Fusion » en 2023. La stratégie comprend des investissements dans un réacteur de fusion (STEP) et des investissements dans les technologies de fusion.
• Des communiqués récents des gouvernements (et organisations gouvernementales) allemand, chinois, coréen, européen (voir aussi cette annonce), indien, japonais (voir aussi cette annonce et cette annonce) et russe soulignent que ces pays ont également des feuilles de route détaillées pour l'investissement dans la fusion. Début 2024, la China a annoncé le lancement de Fusion Energy Inc, un consortium qui réunit 25 entreprises et institutions académiques autour de la construction d'un réacteur de fusion prototype. Au mois d'avril 2024, le Japon et les États-Unis ont signé un accord de partenariat appelant à accélérer la concrétisation commerciale de la fusion.
• L'activité du secteur privé s'accélère également. À la fin de l'année 2023 on comptait 43 compagnies privées dans 12 pays, qui bénéficiaient de plus de 7 milliards de dollars d'investissement privé. (Voir les ressources ci-dessous.)
• Pour plus d'informations sur les recherches en cours dans le monde sur l'énergie de fusion consultez ces ressources : Perspectives de l'AIEA sur la fusion dans le monde 2024 ; FusDIS, the Fusion Device Information System (AIEA) ; Global Fusion Industry in 2024 (Fusion Industry Association) ; The Fusion Industry Supply Chain 2024 (Fusion Industry Association).
Les premiers tokamaks, dans les années 1950 à 1970, étaient des machines de petite taille dont la technologie et les systèmes de contrôle étaient relativement simples. Ces machines ont cependant démontré que l'on pouvait générer des plasmas de haute température et que leur énergie pouvait être confinée. Ces premières expériences ont également permis d'identifier de nouveaux phénomènes physiques, comme le « transport anormal » lié à la turbulence ; les instabilités ou les perturbations. De même, la mise en évidence des « lois d'échelle » a laissé entendre, dès cette époque, que le confinement de l'énergie pouvait être amélioré à condition de disposer de machines de plus grande taille mettant en œuvre des champs magnétiques plus puissants.
La seconde génération, dans les années 1980, est caractérisée par l'utilisation extensive des moyens de chauffage auxiliaires. En équipant les tokamaks d'un divertor, on obtint un meilleur confinement et l'on introduisit de nouvelles techniques de préparation des parois internes de la machine. En 1982, le tokamak ASDEX expérimenta pour la première fois un mode de confinement élevé - le « Mode H ».
Une nouvelle génération de tokamaks de plus grande taille, comme le JET (Europe), JT-60 (Japon), TFTR (USA), KSTAR (Corée), et T-15 (Union soviétique), se donna alors pour objectif l'étude de plasmas dans des conditions aussi proches que possible de celles d'un réacteur de fusion. Intégrant les dernières avancées de la recherche dans le domaine de la fusion, ces machines ont été régulièrement améliorées. On introduisit les aimants supraconducteurs, les opérations en deutérium-tritium ou encore les opérations de télémanipulation. L'expérience accumulée par ces machines a largement contribué à la conception d'ITER.
La recherche sur la fusion aborde aujourd'hui l'exploration du « plasma en ignition », dans lequel la chaleur issue de la réaction de fusion est retenue dans le plasma en quantité suffisante pour permettre à cette même réaction de se maintenir pendant une longue durée. Cette exploration constitue une étape indispensable sur le chemin de l'exploitation de l'énergie de fusion ; elle permettra d'aborder les phases ultérieures en toute confiance. Construire ITER et mener à bien son programme de recherche permettront d'entreprendre cette exploration.
Dans le monde entier, un grand nombre de tokamaks contribuent à la compréhension de la fusion par confinement magnétique et contribuent ainsi à la préparation de la phase opérationnelle d'ITER. Voir la liste ici.
Au sein des « concepts de confinement magnétique » (essentiellement les tokamaks et les stellarators), le principal avantage d'ITER est de mettre en œuvre la technologie éprouvée du tokamak, de loin le plus avancé en termes de production d'énergie de fusion. C'est donc le pragmatisme qui a dicté le choix du concept de tokamak pour ITER. Les stellarators sont intrinsèquement plus complexes que les tokamaks (il était par exemple impossible d'optimiser leur conception avant que les superordinateurs ne soient disponibles) mais ils ont l'avantage d'avoir un fonctionnement fiable. Le stellarator Wendelstein 7-X, qui a célébré son premier plasma fin 2015 à Greifswald en Allemagne, permettra de faire des analyses comparatives par rapport à la performance des tokamaks comparables. Ces résultats seront intégrés dans la définition de DEMO, l'installation de fusion qui succédera à ITER.
Les « concepts de fusion par confinement inertiel » sont d'une nature très différente. Ces technologies ont été développées pour simuler des explosions nucléaires et n'étaient pas initialement prévues pour produire de l'énergie. A ce jour, le concept de fusion par confinement inertiel n'a pas démontré qu'il pouvait offrir une solution plus efficace ou plus rapide que le confinement magnétique. Cependant à la fin de l'année 2022, le National Ignition Facility (USA) a réussi à générer plus d'énergie qu'elle n'en a consommé. (Voir cet article.)
On doit également noter qu'un grand nombre de start-up privées sont entrées en lice au cours des cinq années écoulées et qu'elles ont su mobiliser quelque 6 milliards de dollars pour développer de nouveaux concepts de réacteur. Chacune d'entre elles contribue, d'une manière ou d'une autre, à l'objectif commun : maîtriser l'énergie de fusion pour produire de l'électricité.
Dès l’origine, ITER a choisi de répartir la fabrication des éléments stratégiques de la machine entre les sept Membres du programme. Cette décision, qui a considérablement accru la complexité du programme, était motivée par des raisons évidentes : en participant au programme ITER, chaque Membre prépare son infrastructure industrielle et sa base scientifique ainsi que ses physiciens et ingénieurs à aborder l’étape suivante : la construction d’un réacteur de fusion pré-industriel.
L’investissement nécessaire à la construction d’ITER aurait sans doute été trop lourd pour un seul pays. Avec cette organisation, chaque Membre n’assume qu’une partie des coûts du projet mais bénéficie de l’ensemble du programme de développement (des avancées ont déjà été réalisées dans les domaines de la technologie, de la science et des matériaux, et les premières demandes de brevets ont même été déposées) et accédera plus tard à la totalité du programme expérimental, prévu pour durer 20 ans.
La collaboration et la coordination entre les différentes entités du programme ne cessent de s’améliorer. La recherche sur la fusion est remarquable en ce qu’elle est le fruit, depuis très longtemps, d’une démarche collaborative internationale. Les avancées, les découvertes faites dans tel ou tel pays du monde sont immédiatement partagées avec les autres programmes de recherche. C’est une réalité quotidienne dans le programme ITER, qui bénéficie de la diversité des expériences de ses Membres, et notamment des recherches en cours sur les tokamaks opérationnels dans de nombreux pays du monde.
Si ITER se résumait à un programme de construction, son modèle aurait certainement été organisé différemment. Mais ITER est bien autre chose : c’est le programme de recherche sur l’énergie le plus ambitieux et le plus complexe au monde. La collaboration entre les sept Membres d’ITER, qui possèdent tous plusieurs décennies d’expérience dans le domaine de la fusion, s’est révélée extrêmement fructueuse. En mettant en commun leurs ressources, ils sont à même de surmonter les obstacles majeurs qui se dressent encore sur la voie de la fusion.
En se retirant de l'Union européenne le 31 janvier 2020, le Royaume-Uni s'est également retiré de la Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom). Comme les autres pays de l'Union européenne, c'est à travers Euratom, signataire de l'Accord ITER, que le Royaume-Uni participait au programme ITER.
Pendant la période de transition, les responsables politiques du Royaume-Uni ont affirmé à plusieurs reprises qu'ils souhaitaient que leur pays continue de participer au programme ITER. Et c'est le 30 décembre 2020 que le mécanisme pour cette participation continue est devenu plus clair. En parallèle de l'Accord de commerce et de coopération signé entre le Royaume Uni et l'Union Européenne, un deuxième accord sur la coopération dans le domaine du nucléaire a précisé que le Royaume Uni continuera sa participation à Fusion for Energy et leurs programmes et activités, y compris ITER.
Les négociations se sont terminées au mois de septembre 2023 sans accord. Le Royaume Uni ne cherche plus une association avec Euratom, préférant une stratégie domestique pour la fusion qui comprend la poursuite des collaborations internationales, y compris avec ITER. ITER Organization continue à respecter les contrats en cours avec le Royaume Uni mais, pour l'instant, ne conclut plus de nouveaux contrats.
« Q » est le symbole de l'amplification de puissance délivrée par le plasma. Il exprime le ratio entre la puissance injectée par les systèmes de chauffage externes pour porter le plasma à la température requise pour que les réactions de fusion se produisent et la puissance générée en retour par ces mêmes réactions de fusion.
Rappelons comment les conditions de fusion seront créées dans la machine ITER.
- Le combustible gazeux sera introduit dans la chambre à vide par un système d'injection. Quelques grammes seulement suffisent pour occuper le volume de la chambre à vide du tokamak ;
- Un courant électrique injecté dans le plasma déclenchera un « claquage » et une ionisation du gaz — celui-ci se mue en « plasma », quatrième état de la matière ;
- Les variations des champs magnétiques utilisés pour contrôler le plasma génèrent un effet de chauffage (le « chauffage ohmique »). Mais pour porter le plasma d'ITER à la température requise, des moyens de chauffage externe seront également nécessaires ;
- Les millions de watts de puissance de chauffage transférés au plasma sont pris en compte dans le ratio « Q » qui exprime le rapport entre la puissance de chauffage injectée dans le plasma et la puissance de fusion restituée.
ITER est conçu pour produire 500 MW de puissance de fusion, soit dix fois la puissance thermique que les systèmes de chauffage auront fournie au plasma pour le porter à la température à laquelle les réactions de fusion peuvent se produire.
Oui, c'est indéniablement une avancée. Le seuil d'équilibre énergétique du plasma (« breakeven », ou Q=1)—qui correspond au moment où un plasma libère autant d'énergie qu'il en a reçu pour atteindre les conditions de la fusion—n'a jamais été atteint dans une installation de fusion à confinement magnétique. Le record est détenu par le Joint European Torus (JET), qui est parvenu pendant les années 1990 à restituer sous forme d'énergie environ 70 % de la puissance de chauffage qui lui avait été apportée (Q=0.67). ITER est la seule machine au monde conçue pour dépasser ce seuil, ce qui explique que de très nombreux pays, qui disposent par ailleurs de programmes nationaux de recherche sur la fusion, sont également impliqués dans ITER.
L'ambition—et la capacité—d'atteindre Q ≥10 rend la machine ITER unique au monde.
La fusion d'un noyau de deutérium avec un noyau de tritium (D et T, isotopes de l'hydrogène) produit un noyau d'hélium, également appelé « particule alpha », et un neutron.
Le noyau d'hélium emporte 20% de l'énergie produite par la réaction de fusion. Electriquement chargé, il demeure prisonnier du champ magnétique du tokamak et « chauffe » le plasma en lui communiquant son énergie. (Le neutron, lui, s'échappe du plasma.) Le « chauffage par les alphas » réduit le besoin d'apport de chauffage extérieur. Lorsque le chauffage par les noyaux d'hélium devient dominant (> 50 %) le plasma est dit « en combustion » ou « partiellement auto-entretenu » (« burning plasma »).
Cet état de matière n'a jamais existé de manière contrôlée sur la Terre ; il représente un domaine de la physique tout à fait nouveau que nous allons explorer dans ITER.
Oui, et il existe de ce fait un large consensus autour de la réalisation d'ITER. Pouvoir explorer un « plasma en combustion » dans lequel au moins 50 % de l'énergie procède d'un des produits de la réaction elle-même (la particule « alpha ») est une des dernières étapes expérimentales du programme de recherche mondial sur la fusion. La communauté internationale met en commun ses forces créatives, ses compétences technologiques et ses ressources financières pour y parvenir.
A Q=5, les particules alpha contribuent à hauteur de 50 % au chauffage du plasma ; à Q=10 (ITER), leur part est de l'ordre de 66 %. A Q=20 le plasma est quasiment auto-entretenu, avec 80 % de chauffage « interne ». ITER est conçu pour permettre l'étude de plasmas chauffés à plus de 60% par les particules alpha.
La « raison d'être » du programme ITER, est d'offrir aux scientifiques l'opportunité unique d'étudier un plasma en combustion et de faire progresser la science de la fusion. Le retour d'expérience du programme ITER—ausculté en permanence par de très nombreux systèmes de de mesure et de diagnostics—permettront aux physiciens et aux ingénieurs de concevoir les réacteurs industriels et commerciaux de demain.
Compte-tenu de la taille de la chambre à vide qui le contient et de la force du champ magnétique qui le confine (5.3 Tesla), le plasma d'ITER (830 mètres cubes) pourra porter un courant de 15 méga ampères.
Compte tenu de ces paramètres, une puissance de 50 MW de chauffage externe doit être injectée pour porter le plasma à la température de 150 millions de degrés Celsius. Cette température est l'expression de la vitesse à laquelle les particules se déplacent. Avec une densité de particules suffisante, les réactions de fusion causées par leurs collisions doivent produire 500 MW de puissance thermique.
Pourquoi ne pas avoir conçu une machine pour un ratio « Q » de 30 ou 50 ? La réponse est simple : c'est une question de coût. Ce qui compte pour un tokamak, c'est la taille—si tous les autres paramètres restent inchangés, un plus grand tokamak produira un « Q » plus important. Pour atteindre un « Q » plus grand il aurait été nécessaire soit d'augmenter le champ magnétique, soit d'augmenter le grand rayon du plasma. Quelle que soit l'approche, le coût du programme en aurait été majoré, ce qui est difficilement justifiable, dans la mesure où les objectifs du programme peuvent être atteints à Q=10.
Intégrer les systèmes de transformation d'énergie en électricité aurait été possible dans ITER, mais onéreux et sans grand bénéfice pour les objectifs du programme. Cela tient au fait qu'ITER va produire des plasmas de manière non-continue, avec des durées d'impulsion de l'ordre de 400 secondes. Les équipements en question—qui transforment la chaleur en en vapeur sous pression, laquelle actionne des turbines qui produisent de l'électricité par l'entremise d'un alternateur—auront leur place dans la machine qui succédera à ITER, le démonstrateur industriel DEMO, qui, lui, fonctionnera de manière continue.
Le point d'équilibre énergétique du plasma (Q=1) correspond au seuil auquel, dans une installation de fusion, la quantité d'énergie libérée par les réactions de fusion est égale à l'énergie qui a dû être apportée pour créer les conditions de la fusion (voir les précédentes explications). A l'exception d'ITER, aucune machine de fusion au monde n'a la capacité technique d'atteindre, et encore moins de dépasser ce seuil d'équilibre. L'objectif d'ITER conditionne tous les paramètres de la machine —sa taille, son système magnétique, ses systèmes de chauffage externe, etc.
Le calcul du seuil d'équilibre énergétique global d'une installation de fusion (« engineering breakeven ») devra, lui, prendre en compte l'ensemble des systèmes nécessaires au fonctionnement de la machine (et non pas seulement la puissance injectée des systèmes de chauffage). Les réacteurs de fusion du futur seront évidemment conçus pour produire plus d'électricité qu'ils n'en consomment pour assurer le chauffage de plasma, le refroidissement des bobines supraconductrices, le fonctionnement de l'usine de cryogénie, des systèmes de diagnostics et de contrôle, etc.
La principale réponse à cette question procède de la nature même de ces deux sciences et de leurs applications technologiques. En termes de complexité (tant scientifique que technologique), plus d'un ordre de grandeur sépare la fusion de la fission.
La discipline scientifique qui est au cœur de la fusion est la physique des plasmas. Du fait de ses processus non linéaires et stochastiques, celle-ci est particulièrement complexe. La maîtrise de la physique des plasmas n'est pas encore suffisante pour permettre la construction d'une centrale de fusion, laquelle nécessite des technologies de pointe comme la supraconductivité, le vide poussé ou la cryogénie. Entre autres missions importantes, ITER doit démontrer de manière définitive qu'il est possible d'intégrer l'ensemble de ces technologies dans une seule et même installation. Les technologies de la fission, d'autre part, ont évolué au fil de plusieurs générations de machines de fission.
Les prochaines décennies sont d'une importance capitale pour placer l'évolution du monde sur une voie garantissant une importante réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les technologies actuelles, comme celles qui seront disponibles à court terme, seront déployées dès que possible dans cette perspective. Cependant, la population mondiale va continuer de croître et la proportion de personnes vivant dans des villes devrait elle aussi continuer à augmenter. Distribuer l'énergie de manière plus équitable à tous les habitants de la planète implique qu'à une échelle plus importante encore, une énergie durable à faible teneur en CO2 devra être disponible au cours de ce siècle.
Réaliser la puissance de l'énergie de fusion, c’est l’un des défis scientifiques et technologiques les plus ambitieux de notre siècle. La fusion nucléaire peut offrir à l’humanité une source d’énergie sûre, abondante et sans impact sur le climat, mais seulement si nous arrivons à surmonter un certain nombre de défis qui restent sur le chemin. Parmi eux, on peut citer : le développement de matériaux résistants aux conditions extrêmes ; la gestion de rejets thermiques au niveau du divertor ; le développement de systèmes de télémanipulation pour la maintenance ; la démonstration de la faisabilité de la production et le recyclage de tritium à grande échelle ; et enfin la démonstration de la récupération de chaleur et la génération d'électricité. (Voir « Réaliser la fusion en laboratoire » pour plus d’informations sur ces défis.)
Le programme ITER contribuera à relever chacun de ces défis, de manière intégrée, mais la poursuite de recherche et développement restera une condition préalable à une conception de réacteur de démonstration. D’autres dispositifs de recherche sur la fusion, financés par des fonds publics, combinés à l’essor des projets de fusion du secteur privé, offrent la possibilité de progresser encore plus vite, mais seulement avec un engagement transversal renforcé. La poursuite des recherches, la collaboration internationale et multisectorielle, et l’innovation technologique sont essentielles pour concrétiser l’énergie de fusion dans des délais raisonnables.
La question de savoir quand est-ce que l'on pourra voir l'avènement de la fusion commerciale dépend largement de la volonté d'investir dans ce domaine de recherche. Lev Artsimovitch, célèbre académicien russe et l'un des principaux protagonistes de l'histoire de la fusion, avait coutume de dire : « La fusion sera prête lorsque la société en aura besoin. »
ITER est une étape essentielle entre les dispositifs de fusion expérimentaux actuels, de moindre taille, et les réacteurs de démonstration de demain. Fort des connaissances et du savoir-faire acquis au sein d'ITER, et à la recherche conduite en parallèle, les prochaines machines (des démonstrateurs industriels appelés communément DEMO) permettront de tester le fonctionnement en régime continu et l'autosuffisance en tritium. Aujourd’hui, chacun des membres d'ITER est engagé dans un projet DEMO.
Pour plus d’informations sur ces projets, voir la page Après ITER.
Bien sûr, l'avènement de la fusion commerciale dépendra fortement de la volonté des décideurs politiques et économiques d'investir dans ce domaine de recherche.
La puissance du type de réacteur de fusion que l'on envisage pour la deuxième moitié de ce siècle sera du même ordre que celle d'un réacteur de fission conventionnel, à savoir 1 à 1,7 gigawatts. En théorie, l'efficacité et la production du réacteur seront proportionnelles à sa taille si bien qu'il pourra être intéressant d'aller vers des dimensions plus importantes à l'avenir. Pour l'heure, on considère que les bâtiments qui accueilleront les futures centrales de fusion ne seront pas plus grands que ceux des centrales actuelles, au charbon ou nucléaires.
Le principal objectif d'ITER et des futures centrales de fusion est de développer une nouvelle source d'énergie durable et propre. Le coût moyen par kilowatt d'électricité ne peut pas encore être extrapolé ; pour cela, il faudrait plusieurs années d'opération du tokamak ITER. Comme de nombreuses nouvelles technologies, les coûts seront plus élevés au début, la technologie étant nouvelle, puis décroissants par la suite dans la mesure où les économies d'échelle feront baisser les prix.
Pour une arrivée rapide sur le marché, la fusion doit démontrer qu'elle a le potentiel de fournir de l'électricité à un prix compétitif. Bien que ce ne soit pas l'objectif d'un réacteur de démonstration (par exemple le programme DEMO en Europe), cet objectif ultime doit toujours rester une considération, par exemple en maîtrisant les couts de développement. Le tokamak ITER sera équipé d'une multitude de systèmes diagnostiques (50+) ; bien sûr, ce ne sera pas le cas pour la prochaine génération de réacteurs de démonstration.
La réaction de fusion au sein du tokamak ITER et dans les futures centrales électrogènes se produira au sein d'un plasma de deutérium et de tritium, deux isotopes de l'hydrogène.
La production de deutérium repose sur un processus industriel maîtrisé depuis les années 1930. Cette ressource est largement disponible et quasiment inépuisable. Chaque mètre-cube d'eau de mer contient 33 grammes de deutérium. La production de deutérium pour des applications scientifiques et industrielles est déjà acquise.
En revanche le tritium—un isotope radioactif de l'hydrogène à désintégration rapide—n'est présent dans la nature qu'à l'état de traces. De petites quantités de tritium sont également générées par certains types de réacteurs nucléaires conventionnels, de type « CANDU » : de l'ordre de 100 grammes par an, en moyenne pour un réacteur de 600 MW. Multiplié par le nombre de réacteurs de ce type en service dans le monde, on obtient une production annuelle de l'ordre d'une vingtaine de kilos.
Cette production, aujourd'hui inutilisée, suffira pour alimenter ITER pendant la quinzaine d'années que durera sa campagne d'expériences nucléaires. Au-delà, il faudra développer des solutions permettant de produire du tritium en grande quantité—de l'ordre de 70 kilos par gigawatt d'énergie générée par la fusion (par an, à pleine puissance). Et il pourrait y avoir des centaines—voire des milliers—de réacteurs de fusion au début du 22eme siècle.
Comment alimenter ce parc industriel en tritium ?
La nature, comme si elle avait anticipé cette problématique, offre une solution qui combine élégance et efficacité : ça pourrait être la réaction de fusion elle-même, si les ingénieurs réussissent leur pari, qui produira le tritium qui, en retour, l'alimentera. Mieux : tout se passera dans l'enceinte même du réacteur, de façon continue, dans un cycle parfaitement clos. La clé du processus, c'est l'isotope 6 du lithium-6 (Li-6). Quand un atome de lithium-6 est impacté par le neutron produit par la réaction de fusion, il génère du tritium. ITER testera plusieurs prototypes de modules de couverture tritigène ; chacune sera unique, à base de lithium solide ou liquide—mais avec une proportion de Li-6 d'environ 50%. (La proportion « naturelle » de l'isotope n'est que de 7,5%.)
Les réserves de lithium sont-elles suffisantes pour répondre aux besoins d'une filière industrielle de fusion ?
Faisons le calcul. Il y a environ 50 million de tonnes de lithium sur terre (pour moitié dans les gisements de sel, pour moitié dans les roches magmatiques), soit 3 millions de tonnes de l'isotope Li-6. Dans l'eau de mer, le lithium est présent à raison 0,1 partie par million, soit une masse de lithium dans les océans de la planète estimée de l'ordre de 250 milliards de tonnes. Une filière d'extraction, cependant, n'existe pas encore.
Sachant qu'il faut 140 kilos de Li-6 pour obtenir les 70 kilos de tritium nécessaire à la production d'un gigawatt d'énergie thermique dans une centrale à fusion pendant un an ... et si l'on table sur une disponibilité de 80% et une efficacité de conversion de l'énergie thermique en électricité de 30% ... alors la production d'un gigawatt de puissance électrique dans une centrale à fusion requerra environ 500 kilos de Li-6 par an.
Pour 10 000 réacteurs de fusion, 5 000 tonnes seraient nécessaires annuellement.
L'industrie de fusion ne sera pas la seule à consommer le lithium—il faut aussi prendre en compte les besoins des batteries destinés aux marchés des téléphones portables, des ordinateurs, et des véhicules électriques. Mais ces batteries ne seraient pas nécessairement en compétition avec la fusion pour les ressources en lithium. Au niveau de l'économie globale, on pourrait imaginer que les « déchets » des unités d'enrichissement de lithium pour l'industrie de fusion (notamment le lithium Li-7) pourraient servir à la production des batteries lithium-ion et créer ainsi un cercle vertueux. Les spécialistes estiment que—dans l'hypothèse peu réaliste où la fusion couvrirait l'ensemble des besoins énergétiques de la planète—il y aurait suffisamment de lithium présent dans la croûte terrestre pour alimenter les réacteurs de fusion pendant plusieurs millions d'années. Quant au lithium présent dans l'eau de mer, il répondrait aux besoins pendant des millions d'années. Pour ITER et ses systèmes de modules tritigènes expérimentaux, le lithium Li-6 sera fourni par les unités d'enrichissement qui sont déjà existants. La prochaine génération de réacteur de fusion aura probablement besoin de nouvelles usines dédiées.
Les centrales de fusion contrôlée du futur devront produire le tritium qu'elles consommeront. Pour ITER toutefois, l'autosuffisance en tritium n'est pas indispensable. L'une des missions d'ITER dans les dernières phases du programme d'exploitation, consistera à démontrer la faisabilité de plusieurs concepts (4) de production de tritium via le programme dit « Module de couverture test » (Test Blanket Module = TBM). Le programme TBM s'appuiera sur des études de production de tritium réalisées depuis plusieurs années, en particulier par l'Union européenne qui possède une grande expertise dans ce domaine. Ce savoir cumulé permet d'aborder avec une grande confiance la contribution d'ITER à l'autosuffisance des installations de la génération suivante.
ITER et les prochaines machines de fusion utilisant la technologie actuelle en matière de supraconducteurs n'utiliseront qu'une part infime de la production mondiale d'hélium.
L'une des plus grandes réserves d'hélium est constituée par la « Réserve stratégique » des Etats-Unis. Une partie de cette réserve a été mise sur le marché, ce qui a conduit à en diminuer le volume.
Dans le même temps, dans le monde entier, de nouveaux gisements d'hélium sont entrés en production. D'importantes réserves, qui ne sont pas encore exploitées, garantissent qu'il n'y aura pénurie ni pour gonfler les ballons, ni pour refroidir les aimants supraconducteurs — les deux domaines les plus consommateurs d'hélium.
Le prix de l'hélium dans les décennies qui viennent sera largement déterminé par l'offre et la demande. Dans tous les cas, aucune pénurie n'est anticipée.
Lorsqu'ils entreront en exploitation, les réacteurs de fusion pourront non seulement produire le combustible qu'ils consommeront (le tritium) ; l'hélium issu de la réaction de fusion permettra de préserver les réserves naturelles de cet élément.
Bien qu'elles fassent toutes deux intervenir des réactions nucléaires, la fusion et la fission procèdent d'une physique et d'une technologie totalement différentes. Les assemblages combustibles situés dans le cœur d'un réacteur de fission contiennent plusieurs tonnes de combustible radioactif, qui produit de l'énergie en fractionnant des noyaux atomiques (« fission ») lors d'une réaction en chaîne contrôlée. La fusion n'est pas une réaction en chaîne. L'ensemble de l'installation ne contient que quelques kilos de combustible radioactif (tritium), dont quelques grammes à peine réagissent à un moment donné dans la chambre de réaction.
En termes de sûreté, trois caractéristiques confèrent à la fusion un intérêt particulier dans la perspective d'une production d'énergie à grande échelle.
Tout d'abord, la fusion ne génère aucun risque de prolifération nucléaire. Contrairement aux matières fissiles comme l'uranium et le plutonium utilisées dans les réacteurs de fission, le tritium n'est ni fissile ni fissionnable. Un réacteur de fusion comme ITER ne contient aucune matière susceptible d'être exploitée pour la fabrication d'armes nucléaires.
D'autre part, la fusion ne génère pas de déchets nucléaires de haute activité et vie longue. Les « cendres de la réaction » sont constituées d'hélium, un gaz non radioactif. Les substances radioactives présentes dans le système sont le combustible (tritium) et les matériaux activés pendant le fonctionnement de la machine. L'objectif du programme de R&D en cours est de permettre le recyclage des matériaux du réacteur de fusion après moins de 100 ans.
Enfin, les réactions de fusion sont sûres par nature. Il n'existe aucune possibilité d'emballement de la réaction dans un dispositif de fusion (voir « ITER et la sûreté ») et il n'est pas nécessaire de refroidir le combustible usé. Les conditions très spécifiques de la réaction de fusion étant extrêmement difficiles à obtenir et à maintenir, toute perturbation entraînera un refroidissement quasi instantané du plasma et un arrêt de la réaction, de la même façon qu'un brûleur à gaz s'éteint lorsqu'on coupe l'alimentation. Même la perte totale de la fonction de refroidissement due à un tremblement de terre ou à une explosion n'occasionnerait pas la rupture des barrières de confinement. La température à l'intérieur de la chambre a vide - première barrière de confinement - n'atteindrait en aucun cas la température de fusion des matériaux.
Le tritium (l'un des deux combustibles de la réaction de fusion, dont la demi-vie est de 12,3 ans) induira une certaine radioactivité dans la structure de la chambre à vide, tout comme les neutrons rapides issus des réactions de fusion qui sont absorbés à la surface des matériaux entourant le plasma. Mais la fiable quantité de tritium utilisé lors de la fusion (quelques grammes) et la décroissance de la radioactivité qui permettra de réutiliser les matériaux après moins de 100 ans rend cette technologie beaucoup plus attractive que la fission, qui crée des déchets de haute activité demeurant fortement actifs pendant plusieurs milliers d'années.
En cas d'accident, même dans le pire des scénarios envisageables, il ne sera pas nécessaire d'évacuer la population vivant autour de l'installation.
Sur le chemin de l’exploitation industrielle de l’énergie de fusion, l’un des principaux défis consiste à développer les matériaux capables de conserver leurs propriétés physiques après avoir été exposés aux conditions extrêmes (thermiques et neutroniques) qui règnent dans un réacteur de fusion et dont la décroissance radioactive est rapide.
La R&D sur la fusion a déjà abouti au développement d’aciers à faible niveau d’activation. De nouvelles avancées sont attendues, tant pour l’acier que pour d’autres matériaux aux propriétés adaptées aux réacteurs de fusion.
En 2007, en complément de leur engagement dans ITER, EURATOM et le Japon ont signé l’accord d’Approche élargie (Broader Approach). C’est dans ce cadre que sont conduits des travaux de R&D visant notamment à développer des technologies de pointe pour les futurs réacteurs de fusion de démonstration (DEMO). Des travaux sont en cours pour finaliser la conception intégrée d’une installation internationale d’irradiation des matériaux (International Fusion Materials Irradiation Facility - IFMIF), qui permettra de tester et de qualifier des matériaux avancés dans un environnement similaire à celui des futures centrales de fusion.
Les matériaux irradiés seront transférés dans un château de confinement vers des compartiments clos et blindés (cellules chaudes). Dans ces cellules chaudes, plusieurs opérations seront réalisées, notamment le nettoyage, la collecte de poussières, la détritiation, le reconditionnement et la mise au rebut. Les déchets, classés de niveau moyen, seront stockés dans les cellules chaudes d'ITER. Comme le spécifie le Rapport préliminaire de sûreté (RPrS), toutes ces procédures sont intégrées à l'exploitation d'ITER. De ce fait, elles sont également examinées par l'Autorité de sûreté nucléaire française.
Des techniques de télémanipulation ont été mises au point pour les applications de fusion. Elles ont été largement utilisées, par exemple, lors de la mise à niveau récente du JET (Joint European Torus) afin de s'assurer que le personnel n'est pas exposé aux composants radioactifs.
La communauté scientifique de la fusion a accumulé plus de vingt années d'expérience dans l'exploitation de grands aimants supraconducteurs, notamment grâce au Large Helical Device (Japon) et à Tore Supra (France).
Toute perte de supraconductivité est facilement détectée et l'énergie stockée est absorbée par des circuits de sécurité constitués de résistances externes montées en série sur les bobines. En cas de défaillance du système de sécurité et de ses sauvegardes, les bobines peuvent subir des dégâts, mais ceux-ci ne remettent pas en cause l'intégrité de la première barrière de confinement.
Oui, ITER crée des emplois, et pas seulement dans la région.
Considérons d'abord les activités de recherche et de développement et la fabrication des éléments de la machine qui sont en cours dans tous les pays ou groupes de pays Membres d'ITER. En 2020 les agences domestiques — responsables de l'attribution des contrats — ont estimé à plus de 3 200 le nombre de contrats attribués pour le développement et la fabrication des éléments du tokamak, des systèmes industriels et de l'infrastructure.
D'autres contrats sont attribués directement par ITER Organization.
Ces contrats, attribués aux laboratoires spécialisés, aux universités et à l'industrie de tous les pays Membres, requièrent le plus souvent un grand savoir-faire en ingénierie et mobilisent une main-d'œuvre importante. On estime que les trois-quarts de la contribution européenne pour la construction d'ITER bénéficieront directement à l'industrie — un constat qui vaut également pour les autres pays Membres.
Actuellement, on estime qu'environ EUR 4 milliards sont engagés dans la fabrication pour ITER.
Quelque 1 200 personnes ont été emploies sur le chantier, dans les travaux de préparation du site, la construction de l'École internationale Provence-Alpes-Côte d'Azur et l'Itinéraire ITER. Entre 2010 et 2014, 2 500 personnes ont participé à la construction des fondations du Complexe tokamak et des premiers bâtiments de l'installation ITER. Entre 2014 et 2020 il y avait environ 1,800 ouvriers sur le chantier ITER.
Aujourd'hui, environ 6 500 personnes travaillent pour le programme ITER à Saint-Paul-lez-Durance (personnel ITER, sous-traitants, personnel intérimaire, personnel de l'Agence Domestique européenne F4E et leurs sous-traitants, ouvriers). Avec leur famille, ils contribuent à la vie économique de la région.
Depuis 2007, EUR 9,566 milliards de contrats ont été attribués pour le programme ITER par ITER Organization, l'Agence domestique européenne Fusion for Energy, et Agence ITER France. De cette somme totale, 5,765 milliards d'euros ont été attribué à des compagnies françaises, dont 78% (4,516 milliards d'euros) à des entreprises basées dans la région PACA. Statistiques au 31 Décembre 2023.
Une étude de la Commission européenne (2021) a démontré que pour la période de 2008 à 2019, l'impact économique du programme ITER sur l'économie européenne a été largement positif. La valeur ajoutée brute (la valeur totale moins le coût des intrants) pour cette période a été de EUR 1.739 milliards. En outre, les emplois créés (directs et indirects) sont estimés à 29 500 dans toute la zone. Pour chaque emploi lié directement aux activités ITER, l'étude a estimé qu'un autre a été créé de manière indirecte, sur toute la chaîne logistique ou résultant des dépenses des salaires ITER.
ITER est en cours de construction à Saint-Paul-lez-Durance, dans le département des Bouches-du-Rhône. Les bâtiments et l'infrastructure nécessaire pour le premier plasma de la machine sont parachevés a 89% et l'assemblage de la machine est en cours depuis 2020.
En 2015, sous l'impulsion de l'ancien directeur général d'ITER Organization, une analyse exhaustive et approfondie de l'ensemble des opérations de construction, de fabrication et d'assemblage a donné lieu à une actualisation du calendrier. Ce travail, qui intègre les activités d'ITER Organization et des sept agences domestiques, a été présenté au Conseil ITER lors de sa dix-septième réunion au mois de novembre 2015. Le Conseil a fait procéder à un examen détaillé du calendrier et des ressources associées par un groupe d'experts indépendants.
Cette étape franchie, le Conseil a validé le calendrier actualisé jusqu'au Premier Plasma lors de sa 18eme session en juin 2016 et le calendrier intégré au-delà du premier plasma et jusqu'au lancement opérations en deutérium-tritium lors de sa réunion de novembre 2016.
La pandémie de Covid 19 a eu des conséquences mesurables sur les activités de fabrication du programme (fermetures, absences du personnel, retards dans les chaînes d'approvisionnement, désorganisation du secteur de transport...) et, par le même, sur le calendrier ITER. De plus, au mois de novembre 2022, ITER Organization a annoncé que des réparations seraient nécessaires surdeux types de pièces essentielles au fonctionnement du tokamak, les écrans thermiques et les secteurs de la chambre à vide. (Voir les détails ici et ici.) Tandis que la réparation des deux éléments est en cours, la séquence d'assemblage de la chambre à vide est suspendue. Une feuille de route réactualisée (updated Baseline) a été proposée au Conseil ITER au mois de juin 2024 qui prend en compte l’évaluation des effets résiduels de la pandémie, l'évaluation des défis techniques rencontrés, et un planning optimisé relatif aux étapes réglementaires et à l'exploitation de la machine ITER. (Voir cet article pour plus d'informations.)
Le premier « jalon » du plan de 2016 prévoyait de produire un premier plasma dans des conditions d'énergie magnétique et d'intensité électrique faibles, lequel aurait été immédiatement suivi d'une phase d'installation des principaux éléments internes de la machine se déployant sur plusieurs années. Le retard accusé par le programme a ouvert la voie à une nouvelle possibilité : démarrer l'exploitation avec une machine plus proche d'être finalisée.
La nouvelle feuille de route a été conçue pour privilégier un démarrage efficace de l'exploitation scientifique. Pour sa phase opérationnelle initiale (Start of Research Operation, ou démarrage de la phase d'expérimentation), la machine ITER sera équipée d'un divertor, de modules de couverture ainsi que d'autres éléments et systèmes essentiels. Cette configuration permettra de produire des plasmas d'hydrogène et de deutérium-deutérium et d'aller vers des décharges de longue durée sous une intensité du champ magnétique et avec un courant plasma maximaux.
La nouvelle feuille de route propose également d'allouer plus de temps à la mise en service intégrée, de tester certaines bobines magnétiques à 4 K (moins 269°C), de mettre en œuvre un système de chauffage supplémentaire, et d'installer un système de réduction des disruptions. Par ailleurs, le matériau de première paroi face au plasma, le béryllium, sera remplacé par du tungstène.
Le nouveau plan prévoit d'atteindre l'intensité magnétique maximale en 2036, avec trois années de retard sur ce qui était anticipé par la feuille de route de 2016, tandis que le démarrage de la phase d'exploitation deutérium-tritium, en 2039, sera différée de quatre ans.
L’ensemble de ces propositions, ainsi que leur incidence sur le budget et le calendrier du programme, est en cours d’évaluation par le Conseil, qui se réunit la prochaine fois au mois de novembre 2024.
Voir cet article pour plus d’informations.
Trois années de travail ont été nécessaires pour adapter, sur 104 kilomètres, les chaussées, les ponts et les ronds-points de l'Itinéraire ITER aux exigences des convois exceptionnels. Ces convois achemineront jusqu'au site d'ITER, à Saint-Paul-lez-Durance, les éléments fabriqués par les pays membres de l'Organization et arrivés par mer. Le premier convoi exceptionnel a voyagé le long de l'Itinéraire ITER en janvier 2015.
Jusqu'à la fin de l'assemblage de la machine ITER, quelque 250 convois exceptionnels parcourront l'itinéraire ITER de nuit à vitesse réduite, contournant seize villages, négociant seize ronds-points et franchissant trente-cinq ponts. La plus lourde des charges qu'ils transporteront pèse 900 tonnes ; la plus haute 10 mètres ; la plus large 9 mètres ; la plus longue 33 mètres.
Environ 150 convois exceptionnels ont déjà parcouru les 104 kilomètres de l'Itinéraire. Les plus grands ? Les premiers secteurs de la chambre à vide (440 tonnes), les bobines de champ toroïdal (330 tonnes), la bobine poloïdale PF (presque 400 tonnes), et des segments de lignes d'alimentation du système magnétique (feeders).
La construction d'ITER est fondée sur la collaboration entre les sept Membres d'ITER Organization.
L'Europe assume 45,5% du coût de la construction ; la Chine, l'Inde, le Japon, la Corée, la Fédération de Russie et les Etats-Unis prennent chacun à leur charge 9,1% du coût restant.
Les Membres d'ITER apportent l'essentiel de leur contribution (90%) « en nature », c'est-à-dire qu'ils fournissent directement à ITER Organization les bâtiments de l'installation et les éléments de la machine.
La contribution « en nature » des Membres d'ITER a été répartie en quelque 140 « Accords de fourniture » (Procurement Arrangements). Ces documents décrivent les spécifications techniques et les procédures applicables aux systèmes, aux composants ou aux bâtiments du site. La valeur de chaque Accord de Fourniture est exprimée en ITER Units of Account (IUA), en français Unités de compte ITER, une monnaie intérieure conçue pour maintenir dans la durée la valeur attachée à la contribution de chaque Membre.
Les fournitures ont été réparties entre les sept Membres d'ITER sur la base de la valeur des éléments qui les composent. Une fois le composant finalisé, sa valeur est créditée au compte du Membre qui l'a réalisé. Ainsi, contribuer au projet 9,1% de sa valeur revient à ajouter la valeur en IUA des différents éléments fournis.
Pendant la phase d'exploitation, les coûts seront répartis entre les différents Membres de la manière suivante : Europe, 34% ; Japon et Etats-Unis 13% ; Chine, Inde, Corée et Russie, 10%
La France contribue au projet ITER en tant que membre de l'Union européenne (sa contribution représente 20% à peu près de la participation européenne à ITER). Lors de son déplacement à ITER pour l'inauguration de son siège, Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, a confirmé l'engagement de la France à hauteur de 1,2 milliards d'euros jusqu'en 2017.
En outre, en tant que « Pays Hôte », la France a pris un certain nombre d'engagements spécifiques : elle a mis à la disposition d'ITER un site sur lequel elle a réalisé l'ensemble des travaux préalables à la construction de l'installation : défrichement, nivellement et viabilisation. La France a créé une École internationale pour accueillir les enfants des personnels d'ITER et réalisé l'aménagement de l'Itinéraire ITER par lequel seront acheminés les éléments de la machine. Ces engagements représentent environ 260 millions d'euros.
D'emblée et de leur propre volonté, les collectivités locales de la région PACA se sont fortement impliquées dans le projet ITER. Les Conseils généraux des six départements les plus proches d'ITER (Hautes-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Vaucluse, Var and Bouches-du-Rhône), ainsi que le Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur et la Communauté du Pays d'Aix, ont apporté une contribution totale de 467 millions d'euros.
Cette contribution doit être mise en regard des contrats de sous-traitance et des emplois que le projet ITER a générés dans la région (voir le chapître : Retombées Economiques).
Pour tous les pays ou groupes de pays Membres d'ITER, les bénéfices potentiels de leur participation sont importants : en contribuant une partie des frais de construction d'ITER, les Membres en retirent 100% des résultats scientifiques.
L'estimation originelle du coût d'ITER, basé sur le design de 2001, était de 5 milliards d'euros pour la construction. Cette estimation n'intégrait pas l'évolution du coût du travail, l'inflation, ou une marge pour imprévus. Il sous-estimait également la complexité des opérations d'installation et d'assemblage et ne prévoyait pas le stockage sur site des éléments de la machine.
En 2008, alors que la recherche dans le domaine de la fusion avait réalisé d'important progrès, des modifications ont été apportées à la machine dans le cadre d'une revue de design détaillée (par exemple, l'ajout de systèmes d'aimants pour le contrôle des instabilités). Ces modifications ont augmenté le coût global de l'installation. Dans le même temps, le nombre des Membres d'ITER passait de quatre à sept, ce qui a contribué à augmenter le nombre d'interfaces dans le design de la machine. Les coûts de construction ont également connu une forte augmentation depuis 2001—le prix de l'acier a doublé, celui du béton a triplé.
En 2015, ITER Organization a établi un calendrier intégrant de manière exhaustive le planning des quelque 150 000 activités qui concourent à la construction de la machine ITER (systèmes, structures, éléments). Ce calendrier reflétait une bien meilleure compréhension des séquences d'installation, des risques financiers et des coûts prévisionnels. Il a fixé au mois de décembre 2025 la date du Premier Plasma et à 2035 le début des opérations en deutérium-tritium.
Depuis, la fabrication de ces pièces sans équivalent, exceptionnellement complexes et souvent très massives, s’est heurtée à certains défis techniques. Dans la plupart des cas, ces défis ont été relevés ; dans d’autres, des reparations ont été nécessaires. La pandémie de Covid-19 a également eu un impact sur les fabrications. ITER Organization et les agencies domestiques ont depuis préparé une feuille de route (baseline) actualisée qu’ils ont présenté au mois de juin 2024 au Conseil ITER. La proposition, ainsi que son incidence sur le budget et le calendrier du programme, en en cours d’évaluation.
ITER est financé par les sept pays, ou groupe de pays, membres du projet : la Chine, l'Union européenne, l'Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les Etats-Unis. Au total, le coût du programme ITER est partagé par 35 pays.
Dans la mesure où chacun des Membres d'ITER est responsable de la fourniture en nature des éléments de l'installation, qu'il aura fabriqués sur son propre territoire et financés avec sa propre monnaie, la conversion du coût estimé de la construction en une monnaie unique n'est pas pertinente.
Avant l'actualisation récente du calendrier, l'Union européenne avait estimé que sa contribution globale à la construction d'ITER s'élèvera à 6,6 milliards d'euros. (La contribution des autres agences domestiques dépend d'une part des coûts industriels propres à chacun des pays membres, lesquels peuvent être plus ou moins élevés, et d'autre part du pourcentage de cette contribution à la construction de l'installation ITER.)
Sur la base de l'évaluation réalisée par l'Union européenne, on a estimé à 13 milliards d'euros le coût de la construction d'ITER pour l'ensemble des membres du projet — encore ne s'agissait-il là que d'une extrapolation : dans la mesure où le coût réel est différent pour chacun des Membres du projet, il s'avère impossible de fournir une évaluation plus précise du coût de l'ensemble du projet.
Depuis, le Conseil ITER a adopté un calendrier qui fixe au mois de décembre 2025 la date du Premier Plasma et qui fixe à 2035 le début des opérations en deutérium-tritium. Le budget prévisionnel associé a été approuvé par chacun des membres selon les procédures budgétaires propres à leur gouvernement. Le surcoût associé au nouveau calendrier est estimé à 4 milliards d'euros. Depuis, le calendrier du programme ITER a été affecté par la pandémie de Covid-19 et des difficultés de fabrication avec certains éléments de la machine ITER. Une nouvelle feuille de route est à l'étude et sera présentée au Conseil ITER courant 2024.
L'évaluation du coût des autres phases du projet demeure inchangée. Le coût de la phase opérationnelle de l'installation (2019 jusqu'à l'horizon 2037) est évalué à 188 kIUA* par an. Pour ce qui concerne les phases de mise à l'arrêt définitif (2037-2042) et de démantèlement, leur coût en euros a été respectivement établi à 281 et 530 millions (valeur 2001).
*Dans le cadre de l'Accord ITER, l'Unité de compte ITER a été créée pour répartir de manière équitable la valeur de chaque Accord de fourniture (Procurement Arrangement) entre les Membres du projet ; (en 2023, 1 IUA = EUR 1,975.41).
Dans le contexte mondial actuel, marqué par une hausse des prix du pétrole et du gaz naturel, des difficultés d'accès aux sources de combustibles fossiles bon marché et un triplement attendu de la demande énergétique mondiale d'ici la fin du siècle, la question de l'énergie se trouve placée au premier plan. Comment pourra-t-on fournir cette énergie supplémentaire sans augmenter la production de gaz à effet de serre ?
Il est important d'investir dans les énergies renouvelables comme le solaire, l'éolien et la géothermie. Mais il est tout aussi important d'investir dans la R&D sur la fusion car les investissements font progresser la technologie et les avancées technologiques font baisser les coûts. Tous les calculs indiquent que les énergies renouvelables prendront de l'importance lors des prochaines décennies.
Le bouquet énergétique idéal pour l'avenir doit combiner différentes méthodes de production, et non reposer essentiellement sur une seule et même source. La fusion présente des avantages qui justifient la poursuite des recherches : elle pourra être une source d’énergie sûre, abondante et non carbonée, et qui ne sera pas dépendant des conditions méteo, ce qui n'est pas simple avec les méthodes de production utilisant des sources intermittentes comme le vent ou le soleil.
La communauté de la fusion ne se voit pas entrer en concurrence avec les sources d'énergie renouvelables. Elle considère plutôt que, dans un monde toujours plus dépendant de l'énergie, il est important d'explorer toutes les possibilités prometteuses pour notre avenir commun.
ITER Organization gère l’estimation de ses coûts et les risques associés à l’aide de logiciels et de méthodes d’analyse des risques reconnus. Dans tout projet de construction s’étendant sur plusieurs années, le risque existe de voir le budget affecté par des facteurs « externes » (main-d’œuvre, matériaux de construction) ou « internes » (complexité des nombreuses interfaces de conception, modification des conceptions, exigences ou inspections de l’autorité de sûreté nucléaire, etc.).
Conformément à un système de classification des risques en vigueur dans tout programme de cette envergure, chaque activité figurant dans l’estimation des coûts d’ITER Organization est associée à un degré d’incertitude. La valeur de ces activités et leur classement en fonction de leur niveau d’incertitude sont ensuite analysés de manière à estimer un « niveaux de confiance ». Il s’agit là d’outils importants, qui permettent à la direction d’identifier les éventuelles hausses de coûts et de réagir en conséquence.
Pour compenser les risques résultant de l’incertitude procédant de l’estimation des coûts, ITER Organization recherche activement les économies qui lui permettront de contrebalancer les éventuelles hausses de coûts.
La procédure de délivrance de l'Autorisation de création par les autorités françaises a duré plus de 30 mois. La procédure est celle qui s'applique à toute installation nucléaire de base (INB) située sur le territoire national :
- Au mois de mars 2010, ITER Organization a soumis le Rapport préliminaire de sûreté (RpRS) à l'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN), enclenchant ainsi la procédure d'évaluation technique du dossier de sûreté ;
- L'Autorité environnementale française, qui doit émettre un avis conformément à la directive européenne 97/11/CE du 3 mars 1997, a été consultée et a remis son avis le 23 mars 2011. Son avis est favorable et inclut plusieurs recommandations qui seront prises en compte par ITER Organization.
- L'Enquête publique s'est déroulée dans les communes proches du site ITER entre le 15 juin et le 4 août 2011. Le 9 septembre 2011 la Commission d'Enquête Publique a rendu un avis favorable.
- L'instruction technique du dossier, réalisée par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), agissant à titre d'expert de l'ASN, a été lancée au cours de l'été 2010. Au mois de septembre, l'IRSN a remis un rapport de 300 pages au « Groupe Permanent », un groupe de 30 experts choisis par l'ASN. Ce rapport contenait quelque 800 questions directement adressées à ITER Organization. Le Groupe Permanent a rendu son avis favorable à la fin de l'année 2011.
- Le 20 juin 2012, l'ASN a officiellement informé ITER Organization qu'au terme d'une analyse technique approfondie, les conditions opérationnelles et le design d'ITER, tels qu'ils sont décrits dans les Dossiers de sûreté de l'installation, sont conformes aux exigences de sûreté. La proposition de décret a été soumise à la signature du gouvernement français.
- Le 10 novembre 2012, le Journal officiel a publié le décret autorisant l'ITER Organization à créer l'Installation nucléaire de base (INB) ITER.
- En parallèle, l'ITER Organization a livré une évaluation du risque transparente et exhaustive (« stress tests ») aux autorités de sûreté fin 2012. L'examen technique du rapport a été mené par le Groupe Permanent (des experts nommés par les autorités de sûreté nucléaire), qui a conclu en juin 2013 à une seule recommandation : d'approfondir l'étude des conditions climatiques extrêmes, telles des tornades, des averses de grêle, etc. Compte tenu de la solidité de la conception de la sûreté d'ITER, ce rapport de contrôle de la sûreté nucléaire ne devrait pas occasionner des coûts supplémentaires.
ITER est la première installation nucléaire soumise aux exigences particulièrement rigoureuses de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, dite « Loi TSN ».
C'est également la première fois qu'une installation de fusion est considérée comme Installation nucléaire de base (INB) et, à ce titre, soumise à un examen de sûreté en vue d'obtenir une Autorisation de création.
En 2012, au terme d'une analyse approfondie des caractéristiques techniques de la machine et de ses conditions opérationnelles, ITER a été classé Installation Nucléaire de Base (INB) au regard de la réglementation française. Le programme doit désormais franchir une nouvelle étape réglementaire pour pouvoir procéder à l'assemblage de la machine.
De nombreux échanges avec l'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN), ayant pour but de d'examiner « l'approche graduelle » (staged approach 2025-2035) proposée par la direction d'ITER Organization, ont eu lieu au cours de l'année 2017. (Cette approche consiste à construire l'installation étape par étape, en réalisant des expériences opérationnelles entre chacune de ces étapes de manière à renforcer la confiance des Membres du programme et à minimiser les risques financiers.) Les autorités ont jugé cette approche cohérente avec les procédures d'autorisation ;
Une révision de la version 2010 du Rapport préliminaire de sûreté (RpRS) a été entrepris pour tenir compte des changements intervenus dans la conception de la machine au cours des huit dernières années ; un dossier de sûreté a également été remis pour lever, préalablement au lancement des activités d'assemblage du tokamak, le « point d'arrêt » fixé par l'ASN.
La « feuille de route » des procédures d'autorisation inclut deux autres étapes : la demande d'autorisation de démarrage qu'ITER Organization déposera auprès de l'ASN préalablement à la production du premier plasma d'hydrogène (et pareillement, pour le premier plasma hydrogène/hélium) ; et la demande d'autorisation de mise en service de l'installation, qui interviendra avant la première utilisation de tritium dans la machine. Dans les deux cas, ITER Organization devra fournir une mise à jour du Rapport préliminaire de sûreté (RpRS) ainsi que des dossiers de sûreté et d'autres documents techniques.
Voir également le paragraphe « Actualisation ».
Depuis que le dossier d'autorisation de l'assemblage de la machine est entré dans la procédure d'examen approfondi, au mois de mai 2021, l'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) et ITER Organization n'ont cessé de dialoguer. Au mois de janvier 2022, l'ASN a fait part à ITER Organization de sa décision de conditionner la levée du « point d'arrêt » —initialement attendue au mois de février 2022—aux réponses qui seront apportées aux demandes d'informations complémentaires formulées par l'ASN.
Actualisation du mois d’octobre 2023 : La mise à jour de la feuille de route d’ITER implique le renforcement de l’interaction avec l’Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) et les experts de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) pour tout ce qui concerne les questions relatives au « point d’arrêt » dans la procédure d’assemblage de la machine, et l’alignement mutuel sur le déroulement des étapes à venir. Les échanges se poursuivent. Dans le contexte d’une nouvelle feuille de route (« updated Baseline »), l’un des aspects les plus critiques concerne l’amélioration de la séquence d’assemblage, qui permettra d’aborder dans les meilleurs délais la phase de fonctionnement nucléaire de la machine.
La nouvelle approche proposera une phase de fonctionnement à pleine puissance divisée en trois étapes : un démarrage robuste de l'exploitation de la machine (« Start of Research Operation » qui permettra de démontrer le fonctionnement à 15 MA et de mettre en service l'ensemble des systèmes nécessaires ; une phase deutérium/tritium 1 (DT-1), qui sera dédiée à l'exploration des plasmas de deutérium et de deutérium-tritium en mode H avec des niveaux de courant plasma allant jusqu'aux maxima d'ITER (15 MA) ; et une phase deutérium/tritium 2 (DT-2), pendant lequel ITER se trouvera dans sa configuration finale et pourra étudier divers scénarios de physique et évaluer les choix technologiques pour les futurs réacteurs de fusion électrogènes. Cette approche échelonnée permettra de limiter les risques, avec une « prise en main » de l’outil expérimental par étapes, avant de démontrer le fonctionnement à pleine puissance.
ITER est la première installation de fusion soumise à une procédure d'autorisation par une autorité de sûreté nucléaire. Dans ce domaine également, ITER « ouvre la voie » et les installations de fusion à venir bénéficieront des analyses techniques réalisées par ITER Organization à chacune des phases de la procédure, depuis l'autorisation de construction jusqu'à la phase opérationnelle et au démantèlement final.
Même si la température de 100 millions de degrés Celsius est extrême, la densité du plasma (le nombre d'atomes par mètre cube) est environ un million de fois plus faible que celle de l'air et l'énergie totale qu'il contient n'est pas très élevée. La libération très rapide d'énergie peut entraîner des atteintes superficielles sur certains éléments face au plasma (fusion de la surface), insuffisants toutefois pour entraîner des dommages structurels.
L'installation ITER a été conçue de manière à résister à un séisme d'une amplitude 40 fois supérieure, libérant 250 fois plus d'énergie que tout séisme survenu dans la zone par le passé dans la région de Saint-Paul-les-Durance, France. Le bâtiment Tokamak d'ITER sera construit en béton spécialement renforcé et s'appuiera sur des plots-supports, ou piliers, spécialement conçus pour résister aux séismes. Cette technologie a été utilisée pour protéger du risque sismique d'autres structures de génie civil, comme les centrales électriques, et garantir que leur comportement sera conforme aux exigences de sûreté en cas de séisme. Le risque d'inondation a également été pris en compte dans la conception d'ITER et dans son Rapport Préliminaire de Sûreté : dans la situation hypothétique la plus extrême — celle d'une rupture de barrage suite à des épisodes pluvieux exceptionnels - il subsiste une marge de plus de 30 m entre la hauteur maximale de l'eau et le premier soubassement des bâtiments nucléaires.
Suite à l'accident nucléaire survenu à la centrale de Fukushima Daiichi au Japon en mars 2011, le gouvernement français a demandé à l'ASN (l'Autorité de Sûreté Nucléaire) de réaliser des examens complémentaires (« stress tests ») sur les réacteurs du parc nucléaire français, mais aussi sur des installations de recherche. Ces examens visent à examiner la solidité d'une installation face à une série de situations extrêmes (inondation centennale, un séisme d'amplitude exceptionnelle, ou les deux évènements a la fois).
ITER Organization a remis aux autorités le 15 septembre 2012 un rapport sur les « stress tests » effectués. L'examen technique du rapport, mené par des experts nommés par l'ASN (le Groupe Permanent), a conclu en juin 2013 à une seule recommandation : celle d'approfondir l'étude des conditions climatiques extrêmes, telles des tornades et des averses de grêle.
Conformément à la réglementation et aux pratiques françaises, la conception d'ITER prend en compte les risques externes. Le Rapport préliminaire de sûreté (RPrS), que l'organisation ITER a soumis aux autorités intègre une analyse approfondie des risques externes, y compris des risques d'origine humaine. Une partie du Rapport préliminaire de sûreté est consacrée à démontrer la sûreté d'ITER face à des actes malveillants tels que des chutes d'avion.
Dans une machine de fusion de type tokamak, la quantité de combustible présente dans la chambre ne permet d'alimenter la combustion que pendant quelques secondes. Dans la mesure où les conditions très spécifiques de la réaction de fusion sont difficiles à obtenir et à maintenir, toute perturbation entraînera un refroidissement quasi instantané du plasma et un arrêt de la réaction, de la même façon qu'un brûleur à gaz s'éteint lorsqu'on ferme le robinet d'alimentation. Le processus de fusion ne présente donc aucun risque en soi et il n'existe aucun danger d'emballement de la réaction conduisant à une explosion.
Non. Ce qui s'est produit dans les réacteurs de fission de la côte nord-est du Japon, suite à un séisme de grande ampleur et au tsunami qu'il a généré, ne peut pas se produire dans ITER. Et ce, pour une raison simple : les réactions physiques, et les technologies mises en œuvre dans un réacteur de fission sont fondamentalement différentes de celles d'un réacteur de fusion.
Dans ITER, comme dans les futurs réacteurs de fusion, il n'y aura jamais qu'une très petite quantité de combustible. Le combustible d'une installation de fusion est constitué d'un mélange gazeux — un plasma de deutérium et de tritium. Seul un approvisionnement continu en combustible permet d'alimenter la réaction de fusion. Si, pour une raison ou une autre, l'approvisionnement en combustible est interrompu, le processus de fusion est immédiatement stoppé. Il n'a aucun danger de « fonte du cœur » ou d'emballement de la réaction.
En outre, la perte hypothétique de la fonction « refroidissement » n'aurait pas d'impact sur la barrière de confinement. Même dans le cas de la perte définitive du circuit d'eau de refroidissement, par exemple en cas de séisme, les barrières de confinement resteraient intactes. La température de la chambre à vide qui est la première barrière de confinement provoquerait en aucun cas la fonte des matériaux.
Dans un réacteur de fission, il est indispensable de continuer à refroidir le cœur, même après la mise à l'arrêt de l'installation. En effet, la chaleur produite par le processus de décroissance des centaines de tonnes de combustible nucléaire contenues dans la cuve doit impérativement être évacuée.
Dans ITER, comme dans les futurs réacteurs de fusion, la situation est totalement différente. La puissance thermique induite dans la chambre à vide sera faible. En supposant que la chambre à vide ne puisse être activement refroidie, ce qui pourrait être le cas dans l'hypothèse d'une panne totale des systèmes de refroidissement, l'augmentation de la température ne menacerait en aucune manière l'intégrité de l'enceinte.
Les analyses de sûreté présentées dans le Rapport préliminaire de sûreté d'ITER considèrent l'environnement comme un tout, incluant les installations présentes, qu'elles soient nucléaires ou conventionnelles, et qui seraient susceptibles d'avoir une incidence sur ITER. Ces études montrent que la sûreté d'ITER ne sera pas affectée par les accidents survenant dans les installations voisines.
La quantité maximale de tritium sur le site sera définie par les autorités de sûreté française et ne dépassera pas 4 kg. La quantité réelle présente dans ITER à un moment donné sera définie par les besoins opérationnels en fonction du Plan de recherche de l'installation.
Le tritium sera stocké sous forme d'hydrure métallique (c'est-à-dire qu'il sera chimiquement lié à un métal) dans des enceintes dédiées. Ces lits d'hydrure métallique sont très efficaces pour recueillir le tritium et le stocker de manière sûre. Seules les quantités nécessaires au fonctionnement du cycle de combustible seront libérées des lits d'hydrure métallique. En termes de confinement, la performance de ces lits sera conforme à un programme de qualification très strict. Les pertes survenant dans ces lits de stockage procèderont uniquement de la désintégration radioactive naturelle du tritium (la moitié du tritium se désintègre en hélium inerte tous les 12,3 ans).
ITER a mis en place des méthodologies de confinement très sophistiquées, ainsi que des technologies capables d'éliminer et de récupérer le tritium en toute circonstance dans le cas très peu probable où celui-ci se diffuserait dans l'enceinte. Le contrôle du stock de tritium s'effectue au moyen d'une procédure de suivi et de mesures régulières de l'inventaire. Des mesures de sécurité seront prévues pour protéger le tritium stocké.
D'abord, sachez que les neutrons font partie de notre environnement naturel : l'interaction entre le rayonnement cosmique et l'atmosphère de notre planète en produit à chaque seconde de très grandes quantités. Mais avant de toucher le sol la plupart d'entre eux vont interagir avec les noyaux des particules avec lesquelles ils entrent en collision—azote, oxygène, carbone, etc.—perdre leur énergie ou générer des isotopes. Seule une infime proportion—de l'ordre de 100 à 300 neutrons par mètre-carré par seconde—parvient jusqu'à la surface de la Terre, où ils sont « capturés » par les noyaux qu'ils rencontrent à moins qu'ils ne se désintègrent pour former d'autres particules, proton, électron ou neutrino ...
Lorsque le réacteur ITER tournera à pleine puissance, les réactions de fusion produiront de l'ordre de cent milliards de milliards neutrons ... par seconde ! Mais à la différence des neutrons « naturels » issus du rayonnement cosmique, ces neutrons vont rencontrer sur leur parcours une série d'obstacles physiques, dont certains sont particulièrement denses et difficiles à franchir
L'épaisseur des modules de couverture de la chambre à vide ; le cuivre et l'acier de la première paroi; le béton gorgé de bore, un élément qui manifeste un appétit particulier pour les neutrons—tous ces matériaux sont ont pour mission d'absorber le flux de neutrons généré par les réactions de fusion à l'intérieur de la machine et de réduire de manière drastique le nombre de ceux qui pourraient qui se diffuser dans l'environnement.
Pas de quoi s'inquiéter toutefois : au sortir de l'installation, les neutrons survivants seront si peu nombreux qu'ils se dilueront dans le bruit de fond neutronique naturel.
Seule une petite partie du tritium présent dans le Tokamak est effectivement consommée pendant la combustion du plasma. Le tritium sera séparé des gaz extraits de l'enceinte du Tokamak, purifié et stocké en vue de sa réutilisation. L'efficacité de l'élimination du tritium présent dans l'atmosphère de l'enceinte et dans les effluents liquides ; celle de sa récupération pendant l'exploitation du plasma ne dépendent pas de la performance de fusion du Tokamak. La conception de la machine est fondée sur un scénario dans lequel aucune quantité de tritium n'est « brûlée » et la totalité du tritium est transférée de l'enceinte du Tokamak vers le système de récupération.
De nombreuses dispositions ont été prévues, dès la conception de l'installation, pour éviter les pertes de tritium. Une barrière de confinement statique efficace sera installée dans les zones de manipulation du tritium et une cascade de dépressurisation dans les bâtiments empêchera toute diffusion de tritium vers l'extérieur. Les systèmes de confinement statique et dynamique, ainsi que des systèmes de surveillance radiologique et environnementale, seront installés plusieurs années avant que la machine ne soit alimentée en tritium (c'est-à-dire dès le début de la phase d'exploitation deutérium-deutérium). Même les petites quantités de tritium générées pendant l'exploitation deutérium-deutérium seront éliminées et récupérées grâce à des systèmes de traitement du cycle de combustible.
La conception d'ITER est telle que, même en cas de brèche accidentelle dans le Tokamak, les niveaux de radioactivité à l'extérieur de l'enceinte seraient encore très faibles. Le Rapport préliminaire de sûreté d'ITER inclut une analyse des risques et événements susceptibles d'entraîner des accidents dans l'installation. Pendant l'exploitation normale, l'impact radiologique d'ITER sur les populations les plus exposées sera mille fois inférieur au rayonnement ionisant naturel. Dans les scénarios les plus pessimistes, comme un incendie dans l'installation de traitement du tritium, aucune évacuation des populations avoisinantes ou autre contre-mesure ne serait nécessaire.
De par sa nature, la réaction de fusion nucléaire à l'intérieur d'un tokamak ne présente aucun risque. La fusion exige des conditions très spécifiques et la réaction s'éteint d'elle-même si le plasma est trop froid ou trop chaud, s'il y a trop ou pas assez de combustible, en présence de contaminants dans le plasma ou si les champs magnétiques ne sont pas optimaux.
Cependant les éléments d'une installation telle qu'ITER, ou que les centrales de fusion qui lui succéderont, deviendront radioactifs sous l'effet de deux mécanismes : le tritium (l'un des deux combustibles de la réaction de fusion, dont la demi-vie est de 12,3 ans) induira une certaine radioactivité dans la structure de la chambre à vide, tout comme les neutrons rapides issus des réactions de fusion qui sont absorbés à la surface des matériaux entourant le plasma.
La quantité de tritium utilisée pendant les décharges de plasma est très faible, quelques grammes à peine à chaque fois. Des procédures rigoureuses ont été mises en place pour la manipulation et le confinement du tritium. Ces procédures ont fait leurs preuves dans d'autres installations de fusion ainsi que dans les applications médicales et technologiques du tritium. Une barrière de confinement statique efficace sera installée dans les zones où est manipulé le tritium et la régulation en cascade de la pression d'air dans les bâtiments empêchera toute diffusion du tritium à l'extérieur. En cas de rupture accidentelle du confinement dans le tokamak, les niveaux de radioactivité à l'extérieur de l'enceinte d'ITER demeureront très faibles. Le rapport préliminaire de sûreté d'ITER comprend une analyse des risques démontrant que, en fonctionnement normal, l'impact radiologique d'ITER sur les populations les plus exposées sera mille fois inférieur à celui du rayonnement ambiant naturel. Même dans le pire des scénarios, comme un incendie dans l'usine tritium, aucune évacuation des populations riveraines ou autre contre-mesure ne seraient nécessaires.
Contrairement aux réacteurs à fission, les réacteurs de fusion nucléaire ne produiront pas de déchets radioactifs de haute activité/vie longue. Le combustible « brûlé » dans un réacteur de fusion est l'hélium, un gaz inerte. L'activation de la surface des matériaux par les neutrons rapides produira des déchets classés comme très faiblement, faiblement ou moyennement actifs. Tous les déchets seront traités, conditionnés et entreposés sur le site. La demi-vie de la plupart des isotopes radioactifs présents dans ces déchets étant inférieure à 10 ans, la radioactivité des matériaux aura suffisamment diminué après 100 ans pour permettre leur recyclage en vue de les réutiliser, par exemple, dans d'autres centrales de fusion. Ce délai de 100 ans pourrait être encore réduit dans les dispositifs du futur grâce au développement de matériaux « à faible activation ». Il s'agit là d'un volet important des travaux actuels de recherche et développement sur la fusion.
On estime que l'activation ou la contamination des éléments face au plasma, de la chambre à vide, du circuit combustible, du circuit de refroidissement, des équipements de maintenance et des bâtiments générera 30 000 tonnes de déchets de démantèlement, qui seront évacués de l'installation ITER et traités.
ITER Organization a obtenu le titre d'exploitant nucléaire autorisé pour la France en novembre 2012, à l'issue d'une inspection technique poussée de son dossier de sûreté. Première installation nucléaire à avoir été autorisée en France depuis 2006, ITER est le premier site à observer la loi de 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire mais aussi le tout premier dispositif de fusion dont les caractéristiques de sûreté ont fait l'objet d'un examen rigoureux par des autorités de réglementation nucléaire en vue de l'autorisation d'une installation nucléaire.
Un réacteur de fusion tel qu'ITER ne contient aucune matière fissile telles que le plutonium ou l'uranium fortement enrichi susceptible d'être détournée pour fabriquer des armes nucléaires. Le tritium est utilisé commercialement, en petites quantités, dans les secteurs du diagnostic médical et des enseignes lumineuses. Son utilisation par ITER n'ouvrira en aucun cas une nouvelle filière de fabrication d'armes de destruction massive.
Conformément à la réglementation française sur la sécurité au travail et afin de se prémunir contre les risques potentiels, un système intégré de gestion de la sûreté sera mis en place sur le site ITER. Ces risques potentiels seront évalués département par département de manière à mettre en place des mesures de sûreté appropriées. Les risques non radiologiques suivants sont pris en compte sur le site ITER: incendie, exposition aux champs magnétiques et électromagnétiques, exposition aux substances chimiques et aux fluides cryogéniques, hautes tensions. Pour garantir la protection des personnels, l'accès au bâtiment du tokamak sera strictement interdit pendant son fonctionnement.
Depuis le début des années 1960, les physiciens explorent les propriétés des plasmas produits au sein des tokamaks. Ils ont pu établir que dans certaines conditions — par exemple lorsque pour un champ magnétique donné l'intensité du courant circulant dans le plasma, la pression ou la densité atteignent des niveaux trop élevés — le plasma peut devenir instable.
Une disruption est une instabilité qui peut se développer au sein du plasma. Les disruptions conduisent à une dégradation, voire à une perte, du confinement magnétique du plasma. Du fait de la grande quantité d'énergie que contient le plasma, la perte de confinement consécutive à une disruption peut soumettre les éléments internes de la chambre à vide à de fortes charges thermiques, ainsi qu'à de fortes contraintes mécaniques, ces dernières affectant également la chambre à vide elle-même et les bobines du tokamak.
Dans certains cas, l'intense champ électrique qui se créée lors d'une disruption, génère un flux d'électrons relativistes (dont la vitesse est proche de celle de la lumière). En s'échappant du plasma, ce flux d'électrons « découplés » peut pénétrer jusqu'à une profondeur de plusieurs millimètres dans les éléments internes de la chambre à vide.
En l'absence de mesures de prévention appropriées, les charges thermiques et le dépôt des électrons découplés pourraient causer des dommages localisés aux éléments placés face au plasma. En outre, dans certaines conditions extrêmes, les contraintes mécaniques pourraient conduire à la déformation de certains éléments de la machine.
Les disruptions ne sont pas déclenchées par le hasard ; elles se produisent lorsque certaines limites, très bien définies, se trouvent dépassées. Dans la plupart des tokamaks, des disruptions ont été observées, évitées et prévenues. L'un des objectifs d'ITER est d'affiner un scénario opérationnel parfaitement stabilisé, de manière à ce que l'occurrence des disruptions soit la plus faible possible. Au cours des premières années d'exploitation, les opérateurs de la machine chercheront à provoquer de manière délibérée des événements « disruptifs ». Il s'agira alors d'analyser ces événements et d'apprendre à les contrôler dans un plasma aux paramètres réduits et à faible énergie, de manière à ce que les disruptions ne puissent causer de dommages à la machine lorsque le courant plasma et l'énergie atteindront leur intensité maximale.
En « poussant » la machine vers la disruption pendant la production de plasmas de faible intensité, les opérateurs d'ITER pourront déterminer leur domaine de stabilité. Une fois ce domaine délimité, l'augmentation de l'intensité du courant et de l'énergie contenue dans le plasma ne sauraient conduire le plasma à « disrupter » spontanément — à condition que ces paramètres demeurent dans les limites de la zone de stabilité.
Il existe une abondante littérature scientifique traitant des disruptions (voir en particulier la revue Nuclear Fusion) ainsi que sur les stratégies opérationnelles et les modes de conduite de la machine permettant de les éviter ou, si cela s'avère impossible, d'en prévenir les conséquences.
Les disruptions sont partie intégrante des bases de données publiques de la physique d'ITER, analysées et validées par la communauté scientifique ("ITER Physics Basis" Nuclear Fusion, 47; 2007, qui a complété le rapport initial de 1999). Au sein de la communauté des physiciens spécialistes de la fusion, les disruptions forment un domaine de recherche très dynamique dont l'objectif est de parfaire les modèles et techniques permettant d'éviter leur survenue ou de limiter leurs conséquences.
Comme de très nombreux tokamaks de par le monde, le tokamak européen JET depuis 1983 et le tokamak CEA-Euratom Tore Supra depuis 1988 fonctionnent de manière totalement sûre et satisfaisante. Dans toutes ces machines, lorsqu'on explore de nouveaux régimes de plasma ou au cours d'expériences spécifiquement destinées à l'étude des disruptions et de leur atténuation, des disruptions peuvent se produire plusieurs fois par jour — elles n'ont jamais conduit à la destruction, ni même à une rupture de l'enceinte de la chambre à vide.
La chambre à vide d'ITER et ses éléments internes ont été conçus pour résister aux forces que généreront, pendant la durée de vie de la machine, les quelque 3 000 disruptions qui pourraient se produire pendant les phases de fonctionnement à « plein régime ». La résistance d'ITER aux disruptions est fondée sur les « lois d'échelle » (« lois d'ingénierie ») qui ont permis de dimensionner les structures choisies pour ITER ; lesquelles ont été validées par des expériences réalisées sur d'autres tokamaks.
Il est important de souligner que les disruptions n'ont pas d'incidence sur la sûreté de l'installation : elles ne présentent aucun risque pour l'intégrité de la chambre à vide. L'énergie déposée par les disruptions peut toutefois, au fil du temps, altérer la partie superficielle des éléments face au plasma, tels que les cibles du divertor et les modules de la première paroi. Ces derniers ont été conçus pour être, le cas échéant, remplacés. Ces opérations toutefois prennent du temps et réduisent la disponibilité de la machine. C'est pourquoi il est important de développer des techniques de prévention des disruptions et d'atténuation de leurs effets de manière à limiter les forces et les charges supportées par la machine. Ainsi, la fréquence de changement des éléments pourrait être sensiblement réduite et l'exploitation scientifique de la machine optimisée.
Pendant la phase de mise en service progressive d'ITER, les paramètres de la machine (courant plasma, énergie plasma) seront maintenus en deçà des seuils permettant la production d'énergie de fusion. Ainsi, pendant cette phase « d'apprentissage », les dégradations que les disruptions pourraient causer aux éléments de la machine seront minimisées. La mise en œuvre de plasmas de faible énergie, avec de faibles intensités de courant, permettra dans un premier temps d'apprendre à « conduire » la machine de manière à éviter les disruptions ou à en atténuer les effets ; dans un deuxième temps, on explorera des scénarios opérationnels plus avancés, mettant en jeu des courants de plus forte intensité et des niveaux d'énergie plus élevés qui imposeront aux éléments de la machine de plus fortes contraintes. Cette stratégie ne diffère pas de celle qui a été mise en œuvre au JET, le plus gros tokamak aujourd'hui en activité.
ITER a été conçu en anticipant un taux de disruptions de l'ordre de 10% de l'ensemble des plasmas produits. Dans une première phase, la production de plasmas de faible énergie permettra aux physiciens de caractériser les disruptions sans que l'intégrité de la machine soit affecté. La prévention/atténuation des disruptions est un des objectifs scientifiques d'ITER. Cet objectif s'inscrit dans la perspective du développement futur des centrales de fusion électrogènes fondées sur l'architecture du tokamak.
Le design du système de prévention/atténuation des disruptions (Disruption Mitigation System/DMS) d'ITER est en cours d'élaboration. Dans sa recherche de la méthode, ou combinaison de méthodes, optimales, ITER Organization prend en compte l'efficacité attendue tout autant que la fiabilité du système, sa flexibilité et son coût.
Deux méthodes prometteuses sont aujourd'hui privilégiées. L'injection massive de « glaçons,» introduisant en 10 millisecondes une quantité massive (jusqu'à 500g) de particules dans la chambre à vide, permet de dissiper l'énergie d'une disruption avant qu'elle ne concentre sa charge sur la paroi. Éprouvée sur de nombreuses installations, cette technique a été choisi pour ITER. Un programme de développement continue aussi sur une deuxiement technique, l'injection massive de gaz.
La communauté des physiciens de fusion poursuit activement le programme de recherche et de développement sur la prévention/atténuation des disruptions. Des expériences réalisées, entre autres, sur les tokamaks ASDEX Upgrade (Allemagne), KSTAR, Tore Supra (France), DIII-D (États-Unis) et JET (Europe) contribuent à affiner l'approche de la prévention/atténuation des disruptions dans le tokamak ITER. Les moyens toujours plus puissants de la simulation numérique sont également mis à contribution pour mettre au point la stratégie qui sera la mieux adaptée.
Dans la machine ITER, le système de prévention/atténuation des disruptions fonctionnera de manière automatique. Il sera déclenché par des capteurs et des algorithmes conçus pour évaluer la probabilité de l'imminence d'une disruption. Si l'on considère qu'ITER produira en moyenne 10 décharges de plasma chaque jour, que l'on anticipe des disruptions dans 10% d'entre elles, on peut qualifier « d'opérations de routine » le fonctionnement de ce système qui se déclenchera en moyenne une fois par jour — du moins pendant la première phase d'exploitation, tandis que seront élaborés les scénarios opérationnels.
Pour savoir plus sur les disruptions, voir le site de l'Institut de Recherche sur la fusion magnétique (IRFM): http://www-fusion-magnetique.cea.fr/.
Les réacteurs de fusion nucléaire ne produisent pas de déchet de haute activité à vie longue. Le produit de la fusion, sous forme de combustible « brûlé », est de l'hélium, un gaz non radioactif. L'activation des matériaux au sein de la chambre à vide due aux neutrons sera classée de très faible activité, de faible activité, et de moyenne activité. Tous les déchets seront traités, conditionnés et stockés sur site. Parce que la demi-vie de la plupart des radioéléments présents dans ces déchets ne dépassant pas la dizaine d'années, leur radioactivité aura diminué de manière sensible au bout de 100 ans, rendant ainsi possible le recyclage des matériaux (par exemple, au sein d'autres installations de fusion). Dans les machines futures, ce laps de temps pourrait être encore réduit grâce à l'utilisation de matériaux dits « à faible activation ». Une part importante de la recherche dans le domaine de la fusion est aujourd'hui consacrée au développement de tels matériaux.
L'activation ou la contamination des composants de la chambre à vide, de sa structure, du circuit de combustibles, le circuit d'eau de refroidissement, les équipements de maintenance et les bâtiments produiront en tout 30 000 tonnes de déchets qui seront retirées du site d'ITER et traitées.
En tant qu'opérateur, ITER assume la responsabilité financière du stockage temporaire et final des déchets d'exploitation radioactifs. La France, pays d'accueil du projet ITER, sera responsable de la phase de démantèlement et de la gestion des déchets qui en résulteront ; le coût de ces activités sera provisionné par ITER pendant la phase d'exploitation. La France sera également chargée de fournir un entreposage temporaire pour une partie des déchets opérationnels en attendant leur stockage définitif ; ces opérations seront financées dans le cadre des coûts d'exploitation d'ITER.
L'alimentation électrique du site ITER sera assurée par le réseau existant, qui alimente déjà le tokamak Tore Supra du CEA-Cadarache. Le poste RTE ITER, et son raccordement, ont été finalisé en juin 2012. La consommation électrique du tokamak ITER variera de 120 MW en régime stationnaire à 620 MW lors des périodes de pointe de 30 secondes. Les usagers locaux ne subiront aucune perturbation.
ITER utilisera chaque année près de 3 millions de mètres cubes d'eau. Cette eau, qui proviendra du canal de Provence tout proche, sera acheminée par gravité jusqu'à l'installation de fusion par des conduites enterrées. L'eau est essentielle au fonctionnement d'ITER, mais le volume prélevé ne représentera que 1% du volume total transporté par le canal de Provence. L'effet conjugué de l'installation ITER et des installations du voisin CEA sur le volume total transporté par le Canal de Provence ne dépassera pas 5%.
Les questions de circulation sont étudiées avec soin afin de minimiser les risques d'embouteillages à proximité du CEA-Cadarache et du site ITER. Les mesures suivantes sont d'ores et déjà à l'étude : le renforcement du réseau de transport public, l'utilisation du covoiturage et l'étalement des horaires de travail. Des modifications des infrastructures sont également en cours à la sortie d'autoroute « Cadarache » pour faciliter la circulation à destination de ces centres de recherche.
Absolument pas. Les ouvriers du chantier ITER sont protégés par la législation française, qui stipule que toutes les entreprises intervenant sur le chantier, quelle que soit leur « nationalité », doivent se conformer au droit du travail français et plus particulièrement aux conventions collectives des différentes branches.
Conformément à l'Accord ITER (voir question suivante), ITER Organization applique les lois et les réglementations françaises en vigueur dans les domaines de la santé et de la sécurité du public et des travailleurs. Toute personne travaillant sur le site, quelle que soit sa nationalité, perçoit un salaire conforme aux conventions collectives françaises. Tout au long de la construction d'ITER, les autorités compétentes inspecteront régulièrement le chantier comme ils le font sur d'autres lieux de travail en France.
Pour les travailleurs qui n'habitent pas à proximité immédiate d'ITER, les entreprises ont l'obligation contractuelle de proposer des solutions d'hébergement. La qualité devra répondre à la réglementation française.
Comme les Nations unies, l'Unesco, l'Organisation mondiale de la santé ou le Fonds monétaire international, ITER Organization est une organisation internationale, créée par un traité international — « l'Accord ITER » — conclu entre les sept membres d'ITER le 21 novembre 2006 à Paris.
Si elle bénéficie, comme toute organisation internationale, des protections que lui accorde le droit international (inviolabilité de son territoire, de ses biens, de ses documents officiels, etc.), ITER Organization est soumise à la réglementation française dans les domaines suivants (Article 14 de l'Accord ITER):
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Santé et sécurité au travail (dont les règles sont notamment définies dans le code du travail français
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Sûreté nucléaire
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Protection contre les radiations
- Procédure de délivrance de l'Autorisation de création
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Matières nucléaires
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Protection de l'environnement
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protection contre les actes de malveillance
L'Accord de siège du 7 novembre 2007, qui régit les relations entre ITER Organization et son « Pays Hôte », (la France), stipule que le directeur général d'ITER Organization coopérera avec les autorités compétentes françaises pour mettre en place, conformément à la réglementation nationale, des programmes d'inspections et de contrôle dans les domaines définis par l'article 14.
Ces programmes font l'objet de révisions annuelles entre ITER Organization et les différents services ou autorités de contrôle concernés — Inspection du Travail, forces de l'ordre et de sécurité civile du ministère de l'Intérieur, etc.
Les entreprises intervenant sur le chantier ITER, ainsi que leurs salariés, sont quant à eux soumis au droit commun applicable, comme l'est toute entreprise française ou étrangère intervenant sur le territoire national.
Comme cela a été souligné lors des questions précédentes, la loi française protège les ouvriers sur le chantier ITER. Quelle que soit la nationalité de l'entreprise sous-traitante, son activité sur le site d'ITER sera régie par le droit commun français ; quelle que soit la nationalité de ses salariés, ils relèvent des conventions collectives françaises propres à leur secteur d'activité.
Dès 2011, le gouvernement français a rédigé un document bilingue très complet (« Guide relatif aux entreprises non établies en France qui détachent temporairement leurs salariés sur le territoire français pour le projet ITER ») présentant l'ensemble des obligations auxquelles les entreprises étrangères intervenant sur le chantier ITER devront se conformer. Ce guide détaille notamment les grilles de rémunération, métier par métier, qualification par qualification, que les entreprises devront appliquer. Chaque entreprise travaillant sur le chantier, que ce soit pour ITER Organization ou pour l'une des Agences domestiques, dispose d'une copie de ce Guide. L'application de ces règles sera strictement contrôlée par les autorités françaises.
Quant aux personnels directement employés par ITER Organization (~ 1 200 personnes issues d'une trentaine de nationalités), leur statut relève de la réglementation spécifique de l'organisation internationale. Sous-contractants et intérimaires travaillant directement pour ITER Organization relèvent du Code du Travail français.
F4E a mis en place une procédure d'approbation des sous-traitants particulièrement stricte. L'entreprise doit être en situation de conformité dans les trois domaines suivants :
- Conformité administrative (à jour des cotisations, assurance)
- Conformité sécurité (un plan particulier de sécurité et protection de la santé doit avoir été fourni et validé)
- Conformité technique (le sous-traitant doit apporter la preuve de sa capacité technique à faire le travail demandé)
Aucun sous-traitant ne peut être retenu s'il ne remplit pas ces trois conditions. F4E peut exercer son droit d'audit et de suivi pour vérifier que cette conformité est maintenue pendant toute la durée d'exécution des travaux.
Conformément aux stipulations des contrats attribués par F4E, le pourcentage maximal de sous-traitance autorisé est de deux-tiers. Le rang de sous-traitance est en outre limité à 2, c'est-à-dire qu'aucun sous-traitant de rang 2 ne peut sous-déléguer à nouveau sauf si un accord formel de F4E est donné. Cette limitation au rang 2 a été strictement respectée jusqu'à présent et fait l'objet d'un suivis crupuleux.
On estime à 18 million le nombre d'heures-homme nécessaires à la construction de l'installation scientifique ITER. Le nombre de travailleurs impliqués dans les activités de construction a atteint son maximum dans les années 2017-2018 avec environ 2 000 personnes.
De très nombreuses équipes contribuent actuellement aux activités d'assemblage et d'installation de la machine ITER et de ses systèmes industriels. Environ 5 000 personnels sous-traitants rattachées à ITER Organization ou Fusion for Energy (l'agence domestique européenne)—des ouvriers, des équipes d'encadrement, des ingénieurs, des responsables sécurité—sont présents tous les jours, sans compter les 1 600 personnes travaillant directement pour ITER Organization.
La grande majorité de ces personnels est de nationalité européenne, avec une prépondérance de Français. Des statiques récents (octobre 2022) montrent que 3 855 Français, 421 Italiens, 335 Espagnols, 254 Indiens, 214 Chinois, 165 Portugais, et 119 Roumains tiennent des badges ITER. Des ressortissants de 90 pays en tout sont présents sur le site ITER (voir cet article récent dans le ITER Newsline pour plus de détail.) Dans les années à venir, des personnels spécialisés dans la mise en service des équipements, leur préservation/maintenance, et leur exploitation seront requis.
C'est faux. Toutes les entreprises et les sous-traitants intervenant sur le chantier ITER sont soumis au droit du travail français. Les ouvriers sur le site sont payés (au minimum) le salaire minimum légal en France (SMIC). En cas d'infraction, l'agence domestique européenne refusera d'agréer les sous-traitants. Pour un ouvrier travaillant avec un contrat à temps partiel, le salaire sera payé au prorata du salaire légal à temps plein, en fonction du nombre d'heures travaillées.
Les modalités de collaboration entre ITER Organization et l'Inspection du travail ont été définies dans l'Accord de création du siège (ACS) signé par le gouvernement français et ITER Organization ainsi que dans un protocole spécifique. L'Inspection du travail peut effectuer des inspections inopinées, comme prévu à l'Article 3 de l'ACS et dans le programme annuel d'inspection. ITER Organization a fourni à l'Inspection du travail un badge permanent lui donnant librement accès au site.
Soucieuse de collaborer de la manière la plus étroite avec les autorités françaises en matière de réglementation du travail, ITER Organization a également signé le 1er février 2013 une convention de partenariat avec les Unions régionales de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'Allocations familiales (URSSAF) de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont l'objectif est de lutter contre le travail dissimulé dans les entreprises intervenant sur les chantiers du site ITER. ITER Organization s'est engagé à faciliter les interventions de l'URSSAF, qui réalisera — et a déjà réalisé — des inspections sur le site ITER pour s'assurer que les entreprises se conforment à la réglementation en vigueur en matière de santé et de sécurité.
Conformément aux règles d'accès applicables au site ITER, l'URSSAF annonce sa venue à l'avance afin de permettre à ITER Organization de préparer l'accès mais cela ne signifie pas qu'ITER Organization en informera les entreprises. Il est dans l'intérêt d'ITER Organization et du programme ITER que les autorités françaises puissent accomplir leur mission dans les meilleures conditions.
Les contrats de construction passés par l'agence domestique européenne sont basés sur les conditions contractuelles FIDIC—un standard international qui définit les conditions de contrat applicables à l'industrie de la construction. Les entreprises travaillant pour F4E ont droit à un acompte de l'ordre de 10 % du montant contractuel des travaux. Un échéancier des paiements joint au contrat définit l'échelonnement des versements, dont le montant et les conditions sont stipulés dans le contrat.
Chaque entreprise soumet mensuellement ses devis au maître d'œuvre responsable du chantier ainsi que des pièces justificatives comprenant le rapport d'avancement des travaux concernés. Le maître d'œuvre certifie alors les montants qu'il estime dus et émet un certificat de paiement sur la base duquel l'entreprise pourra soumettre sa facture à l'agence domestique européenne. Le maître d'œuvre peut refuser d'émettre le certificat de paiement si les obligations de l'entreprises, telles que stipulées dans le contrat, n'ont pas été respectées .
L'agence domestique européenne verse le montant indiqué sur le certificat de paiement après réception de la facture de l'entreprise, dans le délai de paiement mentionné dans le contrat (généralement 45 jours). En cas de retard de paiement, l'entreprise a droit à des intérêts de retard. En outre, les contrats passés par F4E stipulent que l'entreprise assume l'entière responsabilité du versement à ses sous-traitants de toutes les sommes légitimement dues et non contestées.