Pièce à pièce, la machine...
Au mois de mai 2020, une pièce d'acier de 30 mètres de diamètre, aussi lourde que trois Airbus A380, était délicatement déposée au fond du vaste puits d'assemblage du tokamak ITER. Avec l'installation de ce premier élément — la base du cryostat — ITER abordait un chapitre nouveau de sa longue histoire. Patiemment, pièce à pièce, l'assemblage de la machine pouvait commencer.
Tandis que ces éléments aux intitulés exotiques prennent place dans le puits d'assemblage, d'autres activités, tout aussi cruciales, se déploient dans le hall adjacent. Là, dans cet immense volume de quelque 300 000 mètres cubes (comparable à celui de la cathédrale de Chartres), le premier des « sous-assemblages » de la machine est en cours de préparation.
Un sous-assemblage associe trois pièces particulièrement spectaculaires : un secteur de chambre à vide de 40° (~ 440 tonnes), deux bobines verticales (~ 350 tonnes chacune) et des éléments plus légers, les boucliers thermiques. Le poids de cet ensemble frôle les 1 500 tonnes et il faut en réaliser neuf pour refermer sur lui-même le tore de la machine.
Fournis par la Corée, ces deux Titans sont capables d'aligner avec une précision quasi millimétrique des pièces de plus de 15 mètres de haut, pesant plusieurs centaines de tonnes.
Réaliser un sous-assemblage, ou mettre en place une pièce dans l'espace qui lui est dévolu au sein de l'assemblage final, c'est conjuguer les contraintes de l'horlogerie aux dimensions de la construction navale.
La plupart des mouvements sont « répétés » en utilisant des charges fantômes — blocs de bétons de masse et centre de gravité équivalents à ceux des charges réelles — qui permettent de prérégler les systèmes de levage, de valider les cheminements et d'anticiper les difficultés éventuelles.
Ces opérations qui se succèdent depuis plus d'un an génèrent un précieux retour d'expérience. « Nous ne cessons d'apprendre et d'améliorer nos procédures, expliquait Jens Reich, l'un des responsables de l'assemblage de la machine, à l'issue de l'installation de la première bobine, le 21 avril dernier. La coordination entre les différents intervenants s'affine et tout ce qui passe depuis un an confirme l'importance des tests et des 'répétitions' systématiques. »
Les mois qui viennent ne seront pas moins intenses que les mois écoulés. Septembre verra la mise en place d'une deuxième bobine annulaire dans la fosse d'assemblage (PF5, 17 mètres de diamètre) et le premier pré-assemblage devrait être finalisé à la fin du mois d'octobre.