Un sans-faute...à renouveler plus de 200 fois

25 nov, 2013
4 heures 45, vendredi 20 septembre. Sur le site d'ITER, à Saint-Paul-lez-Durance, la remorque chargée de 800 tonnes de blocs de béton vient de s'immobiliser. Le jour n'est pas levé. La lune est pleine. Autour de l'énorme véhicule — 352 roues, 46 mètres de long, 9 de large, 11 de haut — on se presse, on applaudit, on se félicite. La réussite de l'opération « convoi test » est totale.
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Il est un peu plus de 4 heures. La remorque passe le rond-point d'accès à ITER.

Autour de l'énorme véhicule — 352 roues, 46 mètres de long, 9 de large, 11 de haut — on se presse, on applaudit, on se félicite. La réussite de l'opération « convoi test » est totale.

Quatre nuits plus tôt, sur les rives de l'Etang de Berre, une longue procession d'hommes et de machines s'était mise en route. Son objectif : tester en vraie grandeur le transport d'une pièce de la machine ITER entre Berre et le site de construction de l'installation distant d'une centaine de kilomètres, et mesurer, au passage de chaque ouvrage d'art, le stress imposé par une telle charge.
 
L'opération, qui a mobilisé une grosse centaine de personnes, marquait l'aboutissement de plusieurs années de travail, tant sur l'itinéraire lui-même que dans la mise en place d'une machinerie administrative et réglementaire d'une extraordinaire complexité : on ne transporte pas les éléments de la machine ITER comme on transporte un container ou un chargement de bois.
 
En préférant au site japonais de Rokkasho-Mura, sur l'océan Pacifique, celui que l'Europe proposait à proximité immédiate des installations du CEA-Cadarache, à une centaine de kilomètres à l'intérieur des terres, les partenaires d'ITER savaient dès 2005 qu'ils auraient à résoudre une sérieuse difficulté : comment transporter dans les meilleures conditions de sécurité et sans faire peser de trop fortes contraintes sur les populations locales les éléments de la machine fabriqués dans les usines du monde entier ?
 
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Mission accomplie. La remorque chargée de 800 tonnes de blocs de béton vient de s'immobiliser sur le site d'ITER, à proximité du PF Coil Building.
Après avoir exploré plusieurs solutions, le choix s'était porté  sur la création d'un itinéraire spécial, combinant aménagement de la voirie existante, renforcement des ouvrages d'art et création de chaussées dédiées. Dans le cadre de ses engagements envers ITER, ce travail incombait à la France : financé par l'Etat et le Conseil général des Bouches-du-Rhône, l'Itinéraire ITER dont les études techniques furent lancées au début de l'année 2006, était parachevé en 2010.
 
Ces 104 kilomètres qui partent du Port-de-la-Pointe, sur l'Etang de Berre, rejoignent la vallée de la Durance à hauteur de Mallemort et la suivent jusqu'à Saint-Paul-lez-Durance, forment la « Voie sacrée » du programme ITER. C'est par cet itinéraire que vont transiter, dans les six années qui viennent, la quasi-totalité des éléments qui, une fois assemblés, formeront le gigantesque tokamak ITER.
 
L'opération des 16-20 septembre a donné au public, massé sur le parcours de l'Itinéraire ITER tout au long de ces quatre nuits, une idée de la taille de ces éléments. Certes, les quelque 230 convois qui circuleront à partir de l'été 2014 ne seront pas tous aussi « exceptionnels » et seuls, une trentaine d'entre eux reproduiront certaines des dimensions extrêmes du convoi test (poids, longueur, largeur ou hauteur) sans pour autant les cumuler.
 
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352 roues, 46 mètres de long, 9 de large, 11 de haut... et 800 tonnes de béton.
Mais un « convoi ITER », ce n'est pas seulement une remorque, son escorte et ses véhicules de soutien qui progressent le long d'un itinéraire sécurisé. Ce sont plusieurs dizaines de kilomètres de déviations routières qui doivent être organisées; de délicates opérations de coupure et de réouverture des autoroutes A7 et à A51 ; l'enlèvement et la remise en place de centaines de panneaux de signalisation ; la gestion des imprévus ...
 
C'est tout cela qu'il a fallu « répéter » au cours des nuits du 16 au 20 septembre, dans les conditions les plus proches de la réalité. (Un deuxième test, consacré cette fois à l'organisation logistique, est planifié pour la première quinzaine d'avril).
 
Chacun dans son rôle, l'Agence Iter France ; le transporteur Daher ; l'agence européenne pour ITER ; les autorités françaises (préfecture de région, gendarmerie, etc.) et ITER Organization, destinataire final du colis, ont accompli un sans-faute...qui devra être renouvelé plus de 200 fois dans les six années qui viennent.
 
Un reportage photo complet ici.