Assemblage

Des composants de la taille d'un immeuble ajustés au millimètre près

L'ajustage définitif du premier élément de la chambre à vide du tokamak ITER est désormais achevé : les quatre composants principaux, d'un poids total de 1 250 tonnes, ont été alignés avec une tolérance de 1 mm dans les directions radiale, toroïdale et verticale. Cette prouesse est une première étape vers l'assemblage de huit autres sous-assemblages au cours des mois et des années à venir.
Les quatre composants principaux du premier élément de la chambre à vide sont désormais alignés (la photo représente la chambre à vide vue depuis l'intérieur du sous-assemblage). Cette prouesse ouvre la voie à l'assemblage de huit autres sous-assemblages lors des mois et des années à venir.
ITER est un univers peuplé de composants gigantesques, aussi hauts que des immeubles et aussi lourds que des avions de ligne. Fabriqués dans différentes régions du monde, et souvent transportés sur des distances considérables avant d'atteindre le site de construction d'ITER, ceux-ci doivent être assemblés et positionnés avec une extrême précision. Le défi se révèle particulièrement délicat lorsqu'il s'agit d'assembler certains des composants les plus volumineux et les plus lourds de la machine pour réaliser les « sous-assemblages » qui constituent ses éléments de base.

Un « sous-assemblage » se compose d'un secteur de chambre à vide de 40 degrés, d'un poids de 440 tonnes, du bouclier thermique correspondant et de deux bobines toroïdales en forme de « D » de 360 tonnes et 18 mètres de hauteur chacune. Au total, neuf sous-assemblages seront nécessaires pour réaliser le tore de la chambre à vide.

La première étape de cette séquence d'assemblage unique en son genre s'est déroulée en avril 2021, lorsque le secteur 6 de la chambre à vide a été installé dans l'un des deux portiques de sous-assemblage, suivi des panneaux du bouclier thermique et des bobines de champ toroïdal TF12 et TF13.

L'assemblage et le positionnement de ces gigantesques composants doivent être réalisés avec une extrême précision. En effet, tout écart des tolérances définies pour l'un des composants se trouverait amplifié au niveau du sous-assemblage et, au final, de la chambre à vide elle-même.

« Tout commence par des simulations sous forme de modèles 3D durant la phase de conception, explique Chang Ho Choi, le responsable de la division chargée de l'assemblage et de la livraison des modules des secteurs. Cependant, les modèles informatiques sont une représentation idéale dans un monde parfait. La réalité industrielle est tout autre, en particulier pour des composants de la hauteur d'un immeuble de six étages. La conformité des composants est contrôlée et qualifiée tout au long du processus de fabrication, jusqu'aux essais de réception en usine et sur le chantier. Nous disposons alors des données de « récolement », qui reflètent les dimensions réelles du composant. »

Certains écarts sont inévitables pendant le processus de fabrication. « La question qui se pose est la suivante : quelle seront les conséquences de ces écarts lors des phases d'assemblage ? Et, le cas échéant, comment faire pour les minimiser ou les corriger ? » L'usinage localisé, le soudage de cales et les adaptations de l'interface font partie des solutions envisageables.

Chang Ho Choi, le responsable de la division chargée de l'assemblage et de la livraison des modules des secteurs, a installé son bureau dans une petite pièce située à proximité des outils d'assemblage. Il doit être présent en permanence car des ajustements très fins seront encore nécessaires.
Le 17 septembre, les équipes d'assemblage ont été en mesure de confirmer que l'alignement des quatre composants principaux : le secteur de chambre à vide, son bouclier thermique et deux bobines de champ toroïdal, avait été réalisé avec des tolérances de 0,14 mm dans la direction radiale, de 0,25 mm dans la direction toroïdale et de 0,58 mm dans la direction verticale. « C'est un véritable tour de force », souligne Chang Ho.

Cependant, ces composants ne sont pas les seuls à exiger une extrême précision. Pendant les opérations de sous-assemblage du premier secteur, le portique d'assemblage, en dépit de sa taille et de sa robustesse, s'est légèrement déformé (un millimètre de déplacement au niveau de sa partie supérieure) sous l'effet du poids combiné des composants (1 250 tonnes).

« Cette déformation avait été anticipée, explique Chang Ho. Elle a toutefois eu une incidence sur l'alignement des structures qui assurent la jonction structurelle entre les deux bobines positionnées à leur emplacement définitif. »

Deux solutions ont été apportées. La première tire parti de « l'adaptabilité et de l'incroyable précision »* du portique de sous-assemblage ; la seconde consiste à décaler légèrement l'axe des goujons en acier situés à l'intérieur des manchons qui relient les structures placées entre les bobines.

Cette photo montre le positionnement des trois éléments du sous-assemblage les uns par rapport aux autres. Sur la droite, la partie inférieure de l'une des bobines de champ toroïdal (TF13) ; au centre, le bouclier thermique plaqué argent, beaucoup plus mince, et, sur la gauche, l'ouverture de l'élément de prolongement de la pénétration inférieure du secteur de chambre à vide.
La préparation du premier sous-assemblage entre aujourd'hui dans sa phase finale. Après usinage sur mesure et positionnement des manchons, l'installation des structures placées entre les bobines pourra commencer. Plusieurs autres opérations (soudage des tuyauteries du circuit de refroidissement du divertor et du système de visualisation interne, installation des petits segments du bouclier thermique, etc.) seront effectuées simultanément.

Une fois ces opérations achevées, des outils de calage temporaire seront installés entre le secteur de chambre à vide et les bobines de champ toroïdal afin de maintenir l'écart requis entre ces composants (quelques centimètres). Le premier des neuf préassemblages devrait être prêt pour les opérations de levage lors de la deuxième quinzaine de novembre, une tâche délicate, particulièrement stratégique et sans aucun doute spectaculaire.

*Grâce à un ensemble de dispositifs hydrauliques et de « roulements Hilman », les outils de sous-assemblage du secteur disposent de six degrés de liberté (x, y, z, et rotation radiale, toroïdale et verticale).