A chaque fonction son béton

31 juil, 2014
Des cailloux, du sable, un liant, de l'eau, parfois un additif...à première vue, rien de plus simple qu'un béton. Mais nous sommes à ITER où tout obéit à des normes strictes, où tout est soumis à de multiples procédures de tests et de vérification.
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Les bétons, dans l'installation ITER, jouent un double rôle. Ils garantissent l'intégrité structurelle en même temps que la sûreté de l'installation tout entière. Qu'ils soient ordinaires ou exceptionnels, ils font l'objet de contrôles à chacune des étapes de leur élaboration et de leur mise en œuvre.

Dans la fosse du tokamak, deux dalles d'un mètre et demi d'épaisseur ont déjà été coulées. Pour la première, qui porte les 493 colonnes du système parasismique, on a utilisé un béton standard dont la résistance à la compression est de l'ordre de 3 000 tonnes par mètre carré.

Pour la seconde, qui constitue le « plancher » sur lequel reposeront la machine et ses bâtiments annexes, on a besoin d'une résistance à la compression sensiblement supérieure (4 000 tonnes par mètre carré).

Le béton du plancher est un « béton nucléaire » qui doit agir comme ultime barrière de confinement après les parois de la chambre à vide et l'enceinte de protection biologique (3,5 mètres d'épaisseur) qui entoure la machine.

La couronne sur laquelle reposeront les 23 000 tonnes du tokamak devrait faire appel à un béton encore plus particulier, offrant une résistance à la compression deux à trois fois supérieure à celle du béton de la dalle, et dont la formulation est en cours qualification.

Des éléments de protection biologique, dans l'immédiate proximité du tokamak, seront réalisés dans un « béton lourd » au sein duquel les agrégats habituels peuvent être remplacés par du minerai de fer − la masse, au mètre-cube, passe alors de 2,4 à 3,6 tonnes.

Qu'ils soient ordinaires ou exceptionnels, les bétons utilisés dans la construction d'ITER font l'objet de contrôles à chacune des étapes de leur élaboration et de leur mise en œuvre.

Une fois la formulation établie par le fabriquant (elle relève souvent du secret industriel), l'entreprise chargée des opérations de coulage met en place un programme d'essais en laboratoire, que confirmeront les essais sur maquettes, à échelle réelle.

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Pas de relâche pendant l'été. Ici, le 29 juillet, on coule l'un des plots de la partie centrale du radier du Complexe Tokamak.
Ces différents bétons, quelle que soit leur formulation, doivent être coulés et se répartir de manière homogène dans le réseau serré du ferraillage. Aussi, leur consistance, leur « étalement », sont-ils systématiquement testées au sortir de la centrale, avant chargement dans les « toupies » (les camions équipés d'une cuve rotative qui transportent le béton de la centrale au chantier).

A chaque coulée, des échantillons sont prélevés de manière à étudier l'évolution du béton, à court et moyen terme (de 2 à 90 jours). « Nous multiplions les tests et les vérifications, expliquent Damien Sorbier et Romain Paix, deux des ingénieurs travaux du consortium Engage, maître d'œuvre du chantier et sous-traitant de Fusion for Energy, l'agence européenne pour ITER. Mais tout est mis en œuvre, en amont, pour qu'il n'y ait pas de surprise... »

La température est également très surveillée. Le béton ne doit pas sortir de la centrale à moins de 10° C et ne peut être coulé à plus de 30. En fonction des conditions climatiques, qui sont parfois extrêmes sur le site d'ITER, il faut tantôt le réchauffer, tantôt le rafraîchir.

Pour ITER, la qualité du béton et de sa mise en œuvre est essentielle. Elle conditionne l'intégrité et la sûreté de l'installation tout entière.